Edito:La Grande Percée, soluble dans le bâti ancien ?
22/02/2024
par Fabien Romary
La Grande Percée est un percement dans le vieux Strasbourg qui a fait l’objet de nombreuses publications et études ces dernières décennies. On peut citer par exemple, l’ouvrage « Attention Travaux, 1910, de la Grande Percée, au Stockfeld » qui fait suite à une exposition aux Archives de la Ville en 2010, pour le centenaire de son démarrage.
D’autres articles, mémoires, que l’on trouvera en bibliographie documentent ou synthétisent les travaux de la Grande Percée. Parmi ceux-ci, on citera une excellente synthèse, restituant le contexte de cette Percée, rédigé par Michaël Darin dans un article de l’ouvrage Metacult (2018), « L’alignement et le percement à Strasbourg ». D’autres articles sont en allemand, constituant des travaux peu connus du grand public, notamment ceux de Stefan Fisch et Wolfgang Voigt pour les travaux d’un des architectes majeurs de la seconde tranche, Paul Dopff.
La Grande Percée s’étend de la gare à l'ancienne place de la Bourse, elle a été réalisée en trois périodes, avant 1914, entre les deux guerres puis après 1945 et jusqu’aux années 1970. Elle est également découpée en trois tranches qui ne correspondent pas forcément à ce découpage temporel, sauf la première tranche réalisée avant 1914. La première tranche va de l’église Saint-Pierre le Vieux à la place Kléber. La seconde tranche de la place Kléber au Pont Saint-Nicolas et la troisième tranche du Pont Saint-Nicolas à l'ancienne place de la Bourse.
Cet article se concentre sur la 2e tranche de la Grande Percée (1918-1960). La première tranche (1910-1914) a été la plus étudiée, et la plus décrite avec les réalisations des frères Horn. Elle est aussi la plus spectaculaire au niveau des réalisations. La troisième tranche (1930-1980) n’est quasiment pas abordée dans ce document, sauf quand elle est en lien avec la 2e tranche. Elle pourrait faire l’objet d’une étude similaire.
Cette 2e tranche représente 500 mètres (rue des Francs Bourgeois, rue de la Division Leclerc) sur un total de 1400 mètres pour la totalité de la Grande Percée. La deuxième tranche était nommée initialement sur toute sa longueur Hochstraße, future rue des Francs-Bourgeois. Après 1945, la rue sera en partie renommée, Division Leclerc, après la rue Gutenberg, en hommage à 2e division blindée qui a libéré Strasbourg le 23/11/1944.
Le but de cet article est d’éclairer et de préciser des points peu abordés : Quelles ont été les maisons démolies et quels sont, de façon exhaustive, les immeubles qui les ont remplacés ? Qui les a réalisés et ces nouveaux immeubles sont-ils intégrés au bâti existant, de quelle façon ? Qu’a t-on conservé des maisons démolies, ces éléments sont-ils visibles et où ?
Pour y répondre j’ai découpé mon plan en quatre parties, d’abord nous verrons le contexte historique dans lequel s’est réalisée cette Grande Percée. Nous n’insisterons pas car plusieurs articles existent déjà, mais il permettra d’introduire le contexte de la 2e tranche. Ensuite nous verrons plus précisément les étapes pratiques de la réalisation de la 2e tranche. Dans la troisième partie, la plus importante, nous verrons dans le détail quelles sont les nouvelles constructions, avec à chaque fois les dates de constructions, un descriptif et le détail exhaustif des maisons démolies. Je précise également les éléments sauvegardés dans cette partie, lorsque je suis sûr de leur dépôt, en précisant s’ils sont visibles ou pas. La 4e partie « Morphologie de la 2e tranche » prend de la hauteur et constitue une sorte de synthèse sur ce qui a été réalisé pendant une quarantaine d’année. Je tenterai dans cette partie de dégager des tendances au niveau du style des réalisations. On trouvera enfin en annexe des tableaux synthétiques avec le détail des maisons démolies et les nouvelles constructions.
1. Contexte historique de la Grande Percée
Le projet d’une Grande Percée à Strasbourg date de la période française. L’architecte de Louis XV, Jacques-François Blondel (1705-1774) réalise un projet connu sous le nom de « plan Blondel » (1765) qui restera en grande partie à l’état de papier. Il a le temps de faire quelques démolitions place Gutenberg (la « Pflaz », ancien Hôtel de ville de style gothique) et surtout de construire l’Aubette, bâtiment militaire sur l’ancienne place d’Armes (actuelle place Kléber). La place Kléber reste inachevée. Entre 1840 et 1842, on couvre l’égout à ciel ouvert, rue du Fossé des Tanneurs, de la Grand Rue à la place de l’Homme de Fer, pour des raisons de salubrité publique.
Malgré la mise en place du plan d’extension de la Neustadt à partir de 1880, les difficultés d’hygiène et de circulation au coeur de la ville sont les mêmes au début du XXe. Le coeur de la ville est encore en grande partie constitué d’un lacis de ruelles datant du Moyen-Age. A partir de 1899 le maire Otto Back vote un fonds permettant l’assainissement du vieux Strasbourg1. A titre d’exemple, en 1905 la Ville projette la démolition d’un îlot insalubre, dont elle est propriétaire, rue de la Demi-Lune, rue des Chandelles dans le secteur de la 2e tranche2.
Face à l’ampleur de l’insalubrité, ces opérations d’assainissements par îlots s’avèrent insuffissante. En 1907, le maire Rudolf Schwander présente au conseil municipal les difficultés du vieux Strasbourg : prolifération de logements insalubres, difficultés de circulation et manque de locaux commerciaux. Trois ans plus tard, le 10 mai 1910, le maire expose au conseil municipal le projet de percement par l’architecte de la Ville, Fritz Beblo3.
En 1910 Rudolf Schwander modifie le Bauordnung (règlement des constructions) pour rendre possible la grande percée et modifier les alignements. La hauteur des nouveaux bâtiments est limitée à vingt mètres4.
En outre, le conseil municipal adopte, par un arrêté du 23 novembre 1910, sous l’égide notamment de son adjoint Heinrich Emerich, un règlement relatif à la protection de l’aspect local. Comme le souligne Michael Darin, ce règlement avait pour but la mise en valeur des cultures locales et traditionnelles en s’inspirant des « réglements récents badois, bavarois et saxons (1907-1909), ayant comme objectif l’arrêt de la défiguration de la ville et de la campagne »5.
La première tranche de la Grande Percée s’achève avec le démarrage de la Première guerre mondiale. Les dernières réalisations seront les Galeries Lafayette (Kaufhaus Modern, 1914, Berninger & Krafft), et le vaste immeuble 9 place Kléber / 3 rue des Francs Bourgeois (1914, Paul Horn)
Percée proposée par Beblo : un tracé sinueux et pittoresque
Alors qu’à Paris, avec les travaux d’Haussmann à partir de 1853, et dans d’autres villes, dans la deuxième moitié du XIXe, les percées sont rectilignes, ne ménageant pas le bâti existant, à Strasbourg, au début du XXe, et dans d’autres villes allemandes, le tracé est sinueux et préserve à plusieurs endroits le bâti ancien. L’influence des théories de l’autrichien Camillo Sitte est visible dans le tracé de 1910, reflétant ainsi une nouvelle façon d’intégrer la ville moderne dans la ville ancienne, en ce début du XXe. Camillo Sitte souligne dans son célèbre ouvrage L’Art de bâtir les villes (1889)6, l’effet désastreux des angles droits et des rues rectilignes, il prônait aussi l’asymétrie des places7.
Dans son tracé ondulant et préservant une partie du bâti, la percée strasbourgeoise s’assimile davantage aux percées allemandes. En Allemagne ce n’est pas l’État qui pousse à la percée, mais les municipalités. Pour la genèse de la percée strasbourgeoise, on pourra se reporter à l’excellent article de Michaël Darin dans l’ouvrage Metacult (2018) cité en bibliographie. A titre de comparaison, la percée strasbourgeoise, d’une longueur totale de 1400 mètres, est ambitieuse puisqu’elle est traversante, comme celle de Dortmund d’une longueur 850 mètres. D’autres percées sont importantes comme celles de Berlin (600m) et Hambourg (500 et 350m en 1908/15), mais d’autres sont moins importantes, comme à Darmstadt (200m), Cologne (320m en 1911/13) ou Francfort (300m en 1904/06)8.
Le tracé proposé par Beblo en 1910 sera respecté jusqu’à l’achèvement de la Grande Percée, 50 ans plus tard, en 1960.
Plan, vues et tracé de la seconde tranche
Plan type pour la 2e tranche
Beblo propose un plan type pour l’édification d’immeuble dans la 2e tranche, daté d’avril 1914. Ce plan à arcades reprend quasiment la configuration de l’immeuble modèle pour la 1ère tranche, situé 4-8 rue du Vingt-Deux-Novembre (1914-1916, Fritz Beblo), mais comprenant seulement 4 étages au lieu de 5, Beblo trouvant la hauteur des immeubles de la 1ère tranche excessive9. Ces arcades s’inspirent de celles présentes rue des Grandes Arcades10, dont Beblo avait explicitement fait référence pour le concours des immeubles à l’angle de la place Kléber (Kaufhaus Modern et 9 place Kléber), parallèle à la Grande Percée.
Après la guerre Beblo sera expulsé en 1919, remplacé par Paul Dopff, architecte de la Ville avec qui il travaillait depuis 1912. Il poursuivra ses projets dans la continuité. Le plan type de Dopff, établi en 1920 est dans la continuité de celui de Beblo, tout en le simplifiant. Les ressauts avec pilastres et chapiteaux sont remplacés par des balcons filants et des pilastres simplifiés.
Ce plan type prend exemple sur la rue de Rivoli et la place de l’Étoile à Paris pour leur homogénéité. Dopff souhaitait corriger les défauts de la première phase en créant des îlots homogènes11.
Les arcades sont toujours présentes et seront utilisées dans les deux immeubles construits pour l’Office Public d’Habitations à Bon Marché (10-18 et 20-24 rue de la Division Leclerc), mais dans un epannelage qui se fond davantage dans l’architecture environnante. Nous verrons aussi dans le descriptif des immeubles (Chapitre 3) que les réalisations de Dopff rue de la Division Leclerc seront encore simplifiés par rapport au plan type de 1920.
Dopff préconisait aussi, comme Beblo en 1914, une hauteur moindre des bâtiments de la seconde tranche (18,50 mètres, puis 17,5m au lieu des 20 mètres de la seconde tranche)12, mais à de rares exceptions ces moindres élévations ne seront pas respectées et les bâtiments resteront, pour des raisons évidentes de rentabilité, sur le modèle des 20 mètres sous la corniche.
Aspect des façades : l’avis de la commission des Beaux-arts
Une commission des façades, dite Fassadenkommission ou Kunstkommission (commission municipale des Beaux-Arts), créée en 1910, est chargée de donner son avis sur l’esthétique des nouvelles façades. Chaque acquéreur devait soumettre ses plans à cette commission. Jusqu’en 1919 Beblo faisait partie de cette commission et a eu une grande influence sur la 1ère tranche, mais aussi pour la 2ème tranche comme nous le verrons. Mais c’est surtout sur le choix de la percée, sinuant à travers la vieille ville, que l’influence de Beblo a été déterminante.
Comme le souligne Sophie Eberhardt dans sa thèse, la commission « se réunit à soixante-dix reprises entre 1925 et 1934, dont douze fois en 1926 ». Cela témoigne de l’activité intense et des décisions prises par cette commission13. La commission ne se réunit pas seulement pour la Grande Percée, mais pour tout ce qui concerne l’aspect des façades du vieux Strasbourg, y compris la pose d’enseignes. Les membres de cette commission sont nommés à moitié par le Conseil municipal et par le maire.
L’activité de la commission cesse entre 1954 et 1956. Elle reprendra en 1959 après avoir été renommée « commission municipale pour la Protection de l’aspect local »14.
Composition de la commission des Beaux-Arts en 1927 :15
La composition de la commission change au fil du temps, y compris pendant l’entre-deux-guerres. Certains membres sont présents pendant plusieurs années. Nous proposons arbitrairement la situation au cours d’une réunion en date du 6 octobre 1927, qui correspond à la période de démarrage des travaux de la seconde tranche.
Nous précisons la profession des membres lorsque nous la connaissons. La commission comporte 19 membres, ce nombre a pu évoluer.
M. Hugo Haug, conseiller municipal, secrétaire général de la Chambre de commerce, il est le père de Hans Haug
M. Hans Haug, conservateur des Musées à partir de 1920 et directeur des Musées de Strasbourg entre 1944 et 1963
M. Gustave Oberthür, architecte
M. Minck, maire adjoint ?
M. Klein
M. Paul Dopff : architecte en chef à la Ville
M. Théophile Berst, architecte
M. Koerttge
M. Stambach
M. Eugène Haug, architecte
M. Auguste Mossler : architecte
M. Robert Danis, Architecte en Chef des Bâtiments Civils et Palais nationaux et Architecte en Chef des Monuments Historiques, directeur de l’École Régional d'Architecture depuis 1922
M. Apprill, directeur des travaux municipaux de Strasbourg
M. Schuler
M. Schneider
M. Kamm Louis-Philippe, peintre, illustrateur, professeur puis directeur de l’École des Arts Décoratif (1925-1954)
M. Koenig
M. Mahl
M. Knittel
Préservation du bâti existant
D’après le plan de 1910, plusieurs îlots ou bâtiments devaient être préservés. Sur la deuxième tranche, on mentionnera notamment :
- n°9-15 rue des Francs Bourgeois et 3 rue du Vieux Seigle
- 17, 19 rue des Francs Bourgeois (ancien 1, 3 rue des Fribourgeois) et 127 et 129 Grand Rue, mitoyen, ces deux derniers
- 25 rue des Serruriers, un hôtel particulier du XVIIIe siècle16
- 138 Grand Rue, bâtiment daté de 1657, Ancien Poêle de la Tribu des Maréchaux
- 15-17 rue de la Division Leclerc et 1-3 rue de la Douane
- 6 rue du Vieux Seigle (tour crénelée du XIVe siècle)17
Finalement suite à la DUP du 25 mai 1930 et au redécoupage de certaines parcelles, la plupart des immeubles évoqués seront finalement démolis :
- L’hôtel particulier du XVIIIe siècle au n°25 rue des Serruriers a été démoli mais pour des questions de rentabilisation de la parcelle, et de la présence le long de la nouvelle voie d’une façade pignon aveugle qui aurait été inesthétique
- les 127 et 129 Grand Rue seront démolis en 1933/34 pour des questions de valorisation de la parcelle, comme pour le 25 rue des Serruriers, on y trouve à la place un immeuble au 21 rue des Francs Bourgeois
- 138 Grand Rue, démoli vers 1936 en raison d’une fragilisation de l’immeuble suite à la démolition de la maison mitoyenne au n°136, on y trouve maintenant le 1 rue de la Division Leclerc
- le 17 rue des Francs Bourgeois, sera démoli vers 1930 et deviendra le cinéma Vox
Enfin l’îlot au 9-15 rue des Francs Bourgeois et 3 rue du Vieux Seigle, finalement démoli en 1968/69 alors que la Grande Percée est achevée, dans le cadre d’une opération d’urbanisme.
De nos jours parmi la liste évoquée, seuls les 19 rue des Francs Bourgeois (deux bâtiments), l’îlot 15-17 rue de la Division Leclerc, 1-3 rue de la Douane et la tour crénelée 6 rue du Vieux Seigle, sont encore visibles.
Le tracé initial prévu par Beblo en 1910 suivait au mieux le bâti ancien, non seulement pour des raisons patrimoniales, mais aussi pour éviter un grand nombre d’acquisitions qui auraient été coûteuses pour la collectivité.
En dehors de ces immeubles préservés donnant directement sur le tracé, on verra que la plupart des nouveaux bâtiments sont raccordés aux anciens situés à l’arrière de la parcelle.
Cette deuxième tranche ménage également plusieurs vues sur des édifices préservés près de la voie, voire même plus loin, créant ainsi un parcours à l’allure pittoresque. Ainsi, à plusieurs endroits, en déambulant le long de la Percée on peut voir la flèche de la Cathédrale18.
Relogement des populations
Il est bien documenté que les habitants délogés des immeubles insalubres du centre ville sont installés dans de nouveaux immeubles construits à l’initiative de la Ville et de la SOCOLOPO, mais aussi à des initiatives privées, comme la Caisse d’Épargne, l’assistance privée protestante et des entreprises pour leurs ouvriers (Papeterie de la Robertsau, entreprise Haehl)19. On citera notamment plusieurs réalisations datant de la première tranche de la Grand Percée, la cité jardin du Stockfeld (1912), le foyer du célibataire (1911).
La situation des délogés de la deuxième tranche, après 1920, est moins connue. Les habitants expulsés furent relogés dans différents secteurs de secteur la Ville. En pleine crise de 1929, 20 logements furent aménagés dans l’ancien domaine du Marschallhof (Neuhof), où les constructions d’Habitation à Bon Marché (HBM) ont pris du retard en raison des grèves et d’un hiver 1928/29 rigoureux. 18 logements furent également aménagés dans le Schulmeistergut (probablement les dépendances de l’ancien château de Schulmeister à la Meinau).
La rue de la Lie comportait un grand nombre de logements insalubres. Les habitants expulsés y sont parfois qualifiés d’« asociaux ». Le gros des habitants des maisons démolies dans ce secteur aurait dû être relogé dans le Groupe HBM de la place de la Bourse (connu de nos jours sous le nom de Cité rue Aloïse Stoltz). En raison des retards susmentionnés, les habitants furent relogés dans l’ancien Hôpital militaire de Cronenbourg (ancien Lazaret) que la Ville a racheté en 1929, pour y aménager 83 petits logements pour un coût total de 1462000 francs20.
Les artisans ont été relogés dans des ateliers provisoires sur un terrain de 30 ares qu’a loué l’Office entre la rue des Orphelins et la rue Saint-Gothard pour une durée de cinq ans21.
La Ville prévoyait également, pour reloger les habitants de la 2e tranche, de construire en 1930 18 bâtiments à 3 étages comportant 108 logements au niveau du Marshallhof mais ce projet ayant été refusé par la Préfecture, il fut dans un premier temps abandonné. Le projet se transformera un peu plus tard, en 1932, en construction métallique provisoire selon le procédé « Fillod ». Le domaine du Marschallhof fut démoli et deviendra le « groupe du Marschallhof », construit par l’architecte de la Ville, Paul Dopff, pour l’OPHBM de Strasbourg. Le groupe comprenait 117 logements.
Une autre cité provisoire sous forme de constructions métalliques Fillod fut construite à proximité de l’ancienne caserne d’Artillerie, toujours au Neuhof. Elle comportait 192 logements pour asociaux et 15 immeubles (Cité des Canonniers). Elle fut construite entre 1934 et 1936.
Ces deux cités provisoires, construites plus tardivement, ont accueilli entre-autres des personnes délogées sur le tracé de la 3e tranche de la Grande Percée22. De nos jours ces deux cités provisoires n’existent plus, remplacées par de nouvelles cités (Reuss et Gribeauval).
Inventaire et campagne photographique
Un inventaire est réalisé, sur une sélection de 132 maisons situées sur la Grande Percée, dont la plupart sont vouées à être démolies. Cet inventaire a été réalisé à partir de 1907 par 6 spécialistes, réalisant en binôme un travail de terrain23. Sur chaque fiche normalisée on y trouve un historique, un descriptif avec les éléments remarquables, dont certains sont destinés à être conservés24. Nouveauté à l’époque, un précieux inventaire photographique a été réalisé. L’inventaire ne concerne pas la totalité des maisons à démolir mais une partie seulement (environ la moitié), elles ont été sélectionnées en amont pour leur intérêt.
Sur les fiches, il est indiqué les éléments remarquables à conserver in situ ou dans les musées, mais il est difficile de savoir ce qui a été réellement conservé de nos jours. Nous n’avons indiqué dans le tableau en annexe que les éléments visibles au public (Musée), dans les réserves des Musées, ou sauvegardé chez des particuliers.
2. Étapes de la réalisation de la 2e tranche
On peut distinguer deux grandes étapes pour la réalisation de la 2e tranche de la Grande Percée. La continuation de la Grande Percée est interrompue par la première guerre mondiale, cependant les chantiers commencés sont achevés jusqu’à la place Kléber. Après 1918 les travaux ne redémarreront pas tout de suite.
Au printemps 1920 Strasbourg vit une grave crise du logement. La Ville met en place des mesures d’urgence reléguant la poursuite de la Grande Percée, plus complexe pour satisfaire aux besoins, à plus tard. La première étape de la reprise concerne la période 1925-1930, sur des terrains qui avaient déjà été acquis avant 1918 et dont les maisons ont été démolies avant 1920. Cela concerne le secteur entre la place Kléber et la rue du Vieux Seigle. Sur trois parcelles vendues à des tarifs inférieurs à la valeur réelle pour permettre une prompte réalisation, seront édifiés trois immeubles aux n°4, 5 et 6 rue des Francs Bourgeois. Sur deux de ces opérations, des primes à la construction seront également octroyées25.
La portion entre la rue du Vieux Seigle et le Pont Saint Nicolas (sauf le 6 rue des Francs Bourgeois) a été réalisée après 1930. Tous les immeubles démolis sur cette portion l’ont été après 1930, alors que les formalités d’acquisition des terrains étaient achevés dès 192426. Cette deuxième portion a nécessité une Déclaration d’Utilité Publique (DUP), qui concerne en réalité les portions non réalisées de la 2e et de la 3e tranche, c’est pourquoi nous indiquons également certains bâtiments sur cette dernière tranche (après le Pont Saint-Nicolas).
La « loi Loucheur » de 1928 donne de nouvelles marges de manœuvre à l’Office Public d’Habitation à Bon Marché, lui permettant de réaliser deux immeubles à loyer moyen (ILM), ce seront les Bloc B et C situés 10-18 et 20-24 rue de la Division Leclerc (1934). L’îlot démoli au 9-15 rue des Francs Bourgeois correspond à la réalisation la plus tardive (1972). Cet immeuble n’était pas prévu dans la Grande Percée, nous l’avons tout de même étudié car il se situe directement sur le tracé.
Plusieurs maisons ont été protégées dans l’urgence autour des années 1930 par la commission des Monuments Historiques dont dépend le Ministère des Beaux-Arts. La DUP permettra à la Ville la totalité des déclassements (voir tableau en annexe pour le détail des dates de protection et de déclassement).
Portion sud de la 2e tranche
Déclaration d'Utilité Public27
La Déclaration d'Utilité Publique (DUP) a été votée en séance du conseil municipal de la Ville de Strasbourg en date du 25 mai 1930. Elle doit permettre la prolongation de la Grande Percée à partir de la rue du Vieux Seigle. Les motivations de la poursuite de la Grande Percée que l’on trouve dans la DUP sont l’hygiène, de nombreux immeubles étant insalubres, ainsi qu’un accès rapide de la Gare jusqu’à la place de la Bourse. La DUP étant une spécificité française, elle n’avait pas été réalisée pour la première tranche puisque Strasbourg était sous l’autorité allemande.
La DUP mettra du temps a être validée car plusieurs immeubles sur le tracé sont classés MH ou inscrits. La DUP permet :
- le déclassement des immeubles
- l'expropriation des locataires des logements occupés (logement et baux commerciaux)
- l'exonération des droit de mutation lors de l'acquisition des immeubles
La demande est étudiée par le Préfet qui répond dans un courrier du 31 janvier 1931 qu'un décret simple ne suffit pas. La DUP nécessite un décret rendu par le Conseil d’État.
La commission des Monuments Historiques dépend du Ministère de l’instruction Publique et des Beaux-Arts et du Ministère de l’Éducation Nationale. Cette commission, dans un courrier du 9 juillet 1932, demande à ce que soit conservé le 7 rue d'Or car c'est un « curieux vestige du vieux Strasbourg ». Le 9 rue d'Or pourtant inscrit est jugé « pas très intéressant » par cette commission. Pour conserver le n°7 il faudrait légèrement dévier le tracé de la Grand Percée.
Le Ministre de l’Éducation Nationale étudie la demande de déclassement des immeubles, ce qui prend du temps et nécessite de nombreux échanges de courrier. Après de multiples rebondissements et retards, alors que les travaux sont commencés depuis longtemps, la DUP est définitivement accordée par le Président de la République le 15 décembre 1935. Comme le relève Stefan Fisch dans un article « Il y a du prestige de l’Administration de voir intervenir la déclaration d’utilité publique avant que l’entreprise ne soit achevée »28.
Selon la DUP, 218 immeubles sont concernés par le tracé (donc pour la portion de la Grande Percée non encore réalisée, après la rue du Vieux Seigle).
Radiation de l'inscription des immeubles 7-9 rue d'Or, 19 rue des Bouchers et 25 rue des Serruriers
La commission des Beaux-Arts demande la déviation de la Grande Percée pour éviter la démolition du 7 rue d'Or. Or ce n'est pas possible car cela demanderait de dévier le tracé et d'acquérir d'autres maisons. D'autre part, la maison est en mauvais état, les pans de bois sont en partie pourris. La conservation de la maison nécessiterait également la création d'une nouvelle façade côté Grande Percée, qui n'irait pas dans le style des nouveaux immeubles.
Le 25 rue des Serruriers ne peut pas être conservé, selon la Ville, car le terrain étant bien situé, il ne serait pas suffisamment valorisé. D'autre part, tout un pignon serait borgne en cas de conservation.
Dans un courrier du 1er juin 1933, la mairie demande au Préfet le déclassement de 3 immeubles sur le tracé la Grande Percée29 :
- 7 et 9 rue d'Or
- 19 rue des Bouchers (Corporation de la Fleur)
Sous l'impulsion des membres de la commission municipale des Beaux-Arts et de Hans Haug, dynamique conservateur des musées de Strasbourg, de nombreux éléments des maisons inscrites sont conservés et remontés dans des musées strasbourgeois. On citera notamment :
- la maison 7 rue d'Or démontée puis remontée du Musée de l'Oeuvre Notre-Dame30.
- Le portail avec fronton du 19 rue des Bouchers (ancienne corporation de la Fleur), démontée et remontée au 3 rue des Rohan
Éléments sauvegardés suite aux démolitions
Nous n’avons pas inventorié dans ce document l’ensemble des éléments sauvegardés ou supposés l’être, toutefois on trouvera en annexe les éléments dont nous sommes sûrs qu’on peut les trouver dans les Musées ou réemployés.
Parmi les éléments sauvegardés, plusieurs possibilités :
- dans les musées, visibles au public (Musée l’Oeuvre Notre Dame, Musée Historique), soit sous forme d’objet exposé ou de maisons (7 rue d’Or) ou galeries remontés (136 Grand Rue)
- chez des particuliers (ex : l’architecte Albert Sensfelder déposera des éléments inscrits qu’il installera chez lui, boiseries, portes ou cheminée achetées par des particuliers, etc)
- stockés dans les réserves des Musées (ex : cheminée du 23 rue des Serruriers)
- morceau de façade remonté (ex : 1er étage 136 Grand rue remonté au 143 route de Lyon à Illkirch)
Voir le tableau en annexe des éléments conservés pour plus de détail.
Ci-dessous, exemple d'éléments sauvegardés, les galeries de l'ancien Poêle de la Tribu des Maréchaux (138 Grand Rue) remontées au musée de l'Oeuvre Notre Dame.
3. Nouvelles constructions
14 nouveaux bâtiments sont construits et 76 maisons sont détruites sur la période 1910-1960, sans comptabiliser les démolitions de la seconde guerre mondiale. A la fin des années 1960, une nouvelle opération, en marge de la Grande Percée, démolit 6 maisons qui avait été préservées jusque la (n°9-15 rue des Francs Bourgeois, 1-3 rue du Vieux Seigle). Cela porte donc à 15 nouveaux bâtiments et 82 le nombre de maisons démolies pour la seconde tranche.
Nous allons maintenant, dans le détail, en partant de la place Kléber jusqu’au pont Saint-Nicolas, développer les nouvelles constructions.
5 rue des Francs Bourgeois
Date de construction | 1925 |
Maître d'ouvrage | Auguste Muller et le Dr. Alfred Kuhn |
Architecte | Paul Riegert et Adolphe Wolff |
Cet immeuble classicisant occupe une parcelle en forme de triangle. Côté rue il reprend la volumétrie de l’immeuble 3 rue des Francs Bourgeois, construit en 1913 lors de la première tranche. L’immeuble assure la continuité stylistique avec un entresol et un dernier niveau souligné par une corniche. La façade arrière ne comporte que deux niveaux et assure la transition avec le bâti ancien préservé (dont le n°5 rue des Chandelles « Au Saumon » datant du XVIe siècle).
Les architectes, Paul Riegert (1891-1959) et Adolphe Wolff (1892-1960), réaliseront ensemble trois bâtiments sur la 2e tranche, tous classicisants. Ce seront les architectes les plus prolifiques sur cette voie. Ces architectes sont connus pour la réalisation de l’Esca (1935), un vaste bâtiment néoclassique posé sur les bords de l’Ill.
« Le Nouvel Hôtel » 4 rue des Francs Bourgeois
Date de construction | 1926 à 1927 |
Maître d'ouvrage | Société Immobilière et Hôtelière de France, Paris-Strasbourg |
Architecte | Gustave Oberthür |
Ce bâtiment est muni d'une longue façade qui suit la courbe de la rue, avec quatorze travées de fenêtres côté rue des Francs Bourgeois. Cette impression de longueur est accentuée par le balcon filant du deuxième étage et par l'absence d'avant-corps saillants au milieu de la façade. On peut en trouver juste deux, situés aux extrémités de la façade principale, larges de deux travées de fenêtres et rythmés par des chaînages à refends surmontés de vases décoratifs, qui ne sont pas des pots à feu, puisqu'ils n'ont pas de flamme sculptée. On peut encore mentionner les deux colonnes ioniques qui mettent en valeur l'entrée de l'hôtel, située à droite, mais dans l'ensemble, le décor de la façade est assez simple. Par ses matériaux et sa monumentalité la façade prolonge le magasin Kaufhaus (actuel Galeries Lafayette) situé 34 Rue du Vingt-Deux Novembre et faisant l’angle avec la place Kléber (première phase de la Grande Percée, 1914).
L’architecte, Gustave Oberthür (1872-1965), est surtout connu pour ses constructions régionalisante s’inscrivant dans le mouvement Heimatschutz, ses participations les plus connues dans ce style étant le Lycée des Pontonniers et les Petites Boucheries. Il signe ici un bâtiment néoclassique correspondant à l’autre facette de ses réalisations.
A l'origine l'hôtel était dénommé « Le Nouvel Hôtel », en référence à la nouvelle voie qui venait d'être créé. Pendant la seconde guerre mondiale, lors de l'occupation entre 1940 et 1945 il fut rebaptisé Graf Zepplin, son adresse était 4, Eugen Würtz strasse (nouveau nom de la rue des Francs Bourgeois pendant l'occupation).
Après la guerre, l'hôtel a repris son ancien nom, « Le Nouvel Hôtel », il n'a pris le nom de Hôtel Maison Rouge qu'après la démolition de l'hôtel Maison Rouge de la place Kléber (1973).
Démolitions dans ce secteur
29 maisons, entre les années 1906 à 1925 :
2 à 16 rue des Sept-Hommes, 2 à 26 rue des Chandelles, 3 et 5 rue de la Demi-Lune, 1, 3 et 5 rue Sainte Barbe. La ruelle de la Cuiller-à-Pot est entièrement supprimée (en 1906/07) ainsi que les maisons qui la bordaient (n°1 à 5).
Salle du cinéma Eldorado : un hangar construit provisoirement sur le tracée de la Hochstrasse
Sur ce secteur, les maisons 12 à 26 rue des Chandelles et 3-5 rue de la Demi-Lune, îlot insalubre, ont été détruites dès 190731. A la place on y fera construire en 1911 une salle de cinéma provisoire d’une capacité de 750 places, ayant l’aspect d’un hangar. L’entrée se situait 13 rue Sainte-Barbe. Le commanditaire était Charles Hahn considéré comme le « doyen du cinéma en Alsace »32.
9-15 rue des Francs Bourgeois et 1-3 rue du Vieux Seigle
Date de construction | 1969 à 1972 |
Maître d'ouvrage | Compagnie d’Assurances Trieste & Venise |
Architecte | Albert Sensfelder |
Cette opération est postérieure à la Grande Percée (selon la DUP du 5 Avril 1930). En 1962 une menace plane sur le groupe de maisons situées 9 à 15 rue des Francs Bourgeois (ex rue des Chandelles) et 1, 3 rue du Vieux Seigle.
Un nouveau plan d'alignement a été établi, après guerre, menaçant le n°9 rue des Francs Bourgeois. Selon Georges Laforgue, architecte et urbaniste, directeur des services techniques de la ville « A mon avis, l'immeuble en cause devrait être acquis par la ville et démoli. Il en est de même des autres vieilles bâtisses situées entre la rue du Saumon et la rue du Vieux Seigle. L'arasement de tous ces immeubles permettrait de faire une belle opération d'urbanisme dans ce quartier. ».
Hormis son caractère monumental, à l’échelle des nouveaux bâtiments construits dans la seconde phase de la Grande Percée, cet immeuble n’en reprend ni la matérialité, ni le langage architectural. Pas de pastiche donc à cette adresse, mais un bâtiment typique de son époque, fonctionnaliste, aux nombreuses ouvertures, répondant au programme de son commanditaire, la société d’assurance Trieste & Venise dont le siège est à Paris.
L’immeuble comprend 7 étages dont un dernier niveau en retrait. Il est le plus haut de la rue avec 22,80 mètres sous la corniche au lieu des 20 mètres imposé en 1907 et jusqu’ici respecté. Deux niveaux de parking en sous sol sont prévus.
Selon le descriptif, les façades devaient être revêtues de granit noir, de pierres naturelles blanches et d’aluminium éloxé blanc pour l’encadrement des fenêtres. Dans un procès verbal de la commission des sites du 19 septembre 1969, on apprend que la société d’assurance souhaite que la façade soit finalement revêtue, par mesure d’économie et de goût, de granit vert-argent, comme pour son siège parisien. La commission refuse ce changement dans un premier temps, finalement après entretien avec l’architecte le changement est entériné le 12 novembre 1969.
L’architecte Albert Sensfelder (1909-1992) réalise un bâtiment s’inscrivant dans le mouvement moderne, qui correspond à la deuxième partie de sa carrière, après 1958. Il s’agit de l’une de ses dernières réalisations. Sur la 2e tranche il réalisera également un autre bâtiment au 8 rue de la Division Leclerc (1956), complètement dans un autre style.
La démolition des anciennes maisons a permis d’élargir les voies perpendiculaires (rue du Saumon et rue du Vieux Seigle), la nouvelle réalisation n’avait donc pas pour but premier de faciliter la circulation sur le boulevard. Cela a tout de même permis de mettre en valeur la maison d’angle située 4 rue du Saumon et datée du XVIe siècle, rendant tout de même cette réalisation « compatible » avec l’esprit des nouveaux bâtiments le long de la voie.
Démolitions dans ce secteur
Six maisons démolies : 9 à 15 rue des Chandelles, 1, 3 et 5 (partiel) rue du Vieux Seigle
Ces maisons formaient un ensemble pittoresque qui avait été conservé sur le plan d’aménagement de la seconde tranche de la grande percée, daté de 1930.
Lors du second conflit mondial, en 1944, le secteur entre la rue des Grandes Arcades et la rue du secteur a été bombardé, détruisant certaines maisons situées à l’arrière du groupe évoqué. Les maisons donnant sur la rue des Francs Bourgeois ont été préservées jusqu’en 1968, avant d’être démolies pour l’immeuble actuel.
Maisons remarquables et éléments remontés :
5 rue du Vieux Seigle : Démolition d’une aile Renaissance dans la cour. Ces éléments ont été inscrits pour les protéger. Fontaine et montants de fenêtres remontés chez l’architecte Albert Sensfelder, 44 rue du Général Offenstein (Meinau). La porte d'entrée sur cour datée de 1557 a trouvé un emplacement provisoire dans les ateliers de l’œuvre notre Dame 94 rue de la Plaine des Bouchers.
17 rue des Francs Bourgeois (Cinéma Vox)
Date de construction | 1939 à 1947 |
Maître d'ouvrage | Société Immobilière des Francs Bourgeois |
Architecte | Vladimir Scob, Adolphe Wolff |
La municipalité a décidé lors du Conseil Municipal du 2 juillet 1913, que l'aménagement de la rue du Vieux Seigle (le cinéma forme l’angle) devait présenter un alignement en forme d'arcade au rez-de-chaussée. Dans un courrier, avant le dépôt du permis, l’architecte Adolphe Wolff propose trois arcades, l'une sous la tour de la maison voisine 6 rue du Vieux Seigle, et les deux autres le long de la rue du Vieux Seigle. En raison d'un différent avec le propriétaire de la brasserie au n°6, la réalisation de l'arcade sous la tour ne sera jamais réalisée. Ces arcades avaient une fonction esthétique (évoquant l'architecture vernaculaire de la Ville) mais aussi avec pour but de canaliser les flux, piétons d'un côté et véhicules de l'autre, comme ce fut aussi le cas sur deux immeubles de la rue de la Division Leclerc (ex rue des Francs Bourgeois). L'architecte avait aussi pour consigne de mettre en valeur la tour de la maison voisine. De nos jours, ces arcades ne sont pas accessibles (on ne peut pas passer dessous), et ne l'ont sans doute jamais été, du fait que la dernière travée sous la tour ne fut jamais réalisée. On notera aussi que finalement les architectes proposent six arcades au lieu des trois prévues lors des premiers échanges avant le permis.
Les travaux débutent en 1939 et ne s’achèvent qu’en 1947 en raison de la guerre. Les architectes sont Vladimir Scob et Adolphe Wolff pour la Société Immobilière des Francs Bourgeois. Vladimir Scob, d'origine russe, diplômé de l’École des Beaux-Arts de Paris en 1932, s'est spécialisé dans la construction et la rénovation de cinéma. Il s'est associé pour ce cinéma avec l'architecte local Adolphe Wolff.
D’inspiration moderne, la structure est en béton armé et la charpente métallique, le style de la façade s’inscrit quand à elle dans le mouvement de l’Art Déco. Au moment de sa création, le cinéma disposait d'une grande salle au parterre et d'un balcon, comme tous les cinémas de la ville.
L'aspect de la façade sera contesté après guerre par la Police du Bâtiment, notamment l'enseigne verticale, jugée inesthétique, mais le chantier reprendra néanmoins selon les plans des architectes.
La façade a été conçue pour bien être visible de nuit. Dans un article sur les cinéma strasbourgeois "« Eldorado » A la française ou à l'allemande ? ", l'historien Shahram Hosseinabadi souligne que le premier cinéma a avoir été conçu avec une architecture lumineuse est le Titania-Palast à Berlin en 192733. A la même période et dans un style assez proche, le cinéma Scala était livré juste avant guerre (1939). Le Vox est le dernier grand cinéma livré après guerre, avant le Cinéma UGC, construit à la toute fin du XXe siècle.
Démolitions : Deux maisons datées environ des XVIIe (n°2 rue du Vieux Seigle avec pignon sur rue) et XVIIIe siècle (n°4), démolies pour construire le n°17 rue des Francs Bourgeois. Le cinéma est accolé au 6 rue du Vieux Seigle, disposant d’une tour crénelée datée de 1300 par dendrochronologie. On a pris soin de conserver la tourelle lors de la création du nouvel alignement. La vue sur la tour est facilitée par la hauteur réduite de la façade donnant sur la rue du Vieux Seigle.
vue d'angle. On aperçoit à gauche la tourelle du 6 rue du Vieux Seigle et au fond la flèche de la Cathédrale
« Strasbourg Building » 6 rue des Francs Bourgeois
Date de construction | 1928 à 1930 |
Maître d'ouvrage | SCI Strasbourg Building |
Architecte | Adolphe Wolff, Paul Riegert |
Le premier projet par la société des pétroles de Pechelbronn (architectes Ed. Mewes et Widmann, 1925), était d’une grande modernité, avec parking sous terrain et plateforme rotative pour faciliter les manœuvres. Les plans sont restés à l’état de projet.
La conception de l’immeuble finalement réalisé, un immeuble de rapport, pour la « SCI Strasbourg Building » est très classique, avec un rez-de-chaussée surmonté d'un entresol et quatre étages plus mansardes. Au centre de la façade se trouve un avant corps légèrement en ressaut, comportant cinq travées. Deux ailes latérales sont disposées autour de l'avant-corps. Elles disposent chacune de balcons et oriels. Les façades rue de la Demi-Lune et Grand'Rue sont également richement ornementées et disposent chacune d'un oriel en grès.
L'immeuble dégage une impression de grand luxe au niveau de l'emploi des matériaux. Une grande partie des façades sont en grès. Les seules surfaces lisses se trouvent entre les fenêtres. On trouve sur l'ensemble des façades un abondant décor composé de pilastres, oriels, balcons et bandeaux en grès à différents étages. Le dernier niveau de l'avant-corps central est scandé de colonnes doriques en grès.
Sous les balcons se trouvent des consoles en grès de différentes tailles, décorées de disques pour les plus grandes, renforçant l'aspect néoclassique. Les grilles des balcons et les appuis de fenêtres disposent de ferronneries ouvragées aux motifs Art déco.
L'entrée principale est décorée de mosaïques, on y trouve les initiales des commanditaires "SB", ainsi que, fait rare pour être souligné, la provenance des matériaux : Mosaïque de Maubeuge Landrecies Nord Haenel Strasbourg.
Au dessus de l'avant-corps central, on peut lire en grandes lettres l'inscription "Strasbourg building". A l'origine, d'après l'un des plans ci-dessous, cette inscription figurait au niveau des allèges des fenêtres du deuxième étage. Elle était déjà de grande dimension (10,90 x 0,90 mètre), mais nous ignorons s'il s'agissait de la même enseigne qui aurait été déplacée.
Cet immeuble avec commerces au rez-de-chaussée et bureaux en entresol, témoigne la volonté de dynamiser l’activité commerciale du centre ville, à travers les réalisations de la Grande Percée. Sur une affiche publicitaire on peut voir au côté du « Strasbourg Building » le nouvel hôtel (actuel Hôtel de la Maison Rouge) et le Magmod (actuel Galeries Lafayette).
Démolitions : Au 6 rue des Fribourgeois se trouvait un ensemble en forme de U, datant vraisemblablement du XVIIIe, avec une cour fermée. Avant la Révolution, on y trouvait le poêle des aubergistes (ou poêle des Fribourgeois). Au XXe on y trouvait une école Israélite.
21 rue des Francs Bourgeois
Date de construction | 1934 |
Maître d'ouvrage | Société Immobilière de la Grande Percée S.A. |
Architecte | Edmond Picard |
La Ville a cherché à rentabiliser la parcelle où est situé cet immeuble. Les maisons 127 et 129 Grand rue ont été démolies en 1933/34. Le terrain sera loué sous la forme d’un bail emphytéotique afin de permettre à la « société Immobilière de la Grande Percée » d’y ériger un immeuble34. C’est le seul immeuble privé de la 2e tranche dont le terrain n’aura pas été vendu.
L’immeuble, dans l’angle, paraît massif, hors d’échelle par rapport aux maisons mitoyennes conservées et antérieures à la Grande Percée, les n°19 rue des Francs Bourgeois (1903) et le n°131 Grand Rue (actuel 22 rue Gutenberg). Cette dernière maison a été inscrite à l’inventaire supplémentaire des MH en date du 25/06/1929, en même temps que la maison mitoyenne, 24 rue Gutenberg.
Selon un plan conservé dans le dossier d’archives, non réalisé, mais avec un intéressant pan coupé, l’architecte imaginait que les maisons mitoyennes seraient reconstruites dans un style plus moderne.
Le style de l’immeuble s’inscrit dans l’Art-Déco, avec un caractère géométrique affirmé. La travée latérale donnant sur la rue des Francs Bourgeois est en ressaut, de même que l’angle avec la rue des Serruriers, en saillie sur la rue. Les étages sont soulignés par des bandeaux doubles, affirmant ainsi la verticalité, mais aussi son horizontalité. Les bas reliefs en forme d’accolades au niveau des allèges des fenêtres en ressaut et les ferronneries aux motifs Art-Déco des balcons du quatrième étage animent cet immeuble plutôt rigide.
Comme pour Albert Sensfelder, l’architecte Edmond Picard (1903-inc) a eu plusieurs tendances constructives, mais de façon moins tranchée tout au long de sa carrière. Il réalisera des constructions proches du néoclassicisme et de l’Art-Déco, mais aussi marquées par le mouvement moderne.
rue Gutenberg, à droite l'encorbellement du 22 rue Gutenberg, conservé lors des travaux de la Grande Percée
Démolitions dans ce secteur
12 maisons démolies dans les années 1930 : 2, 4 rue du Vieux Seigle, 4 à 8 rue de la Demi-Lune, 2 à 6 rue des Fribourgeois, 121 à 129 Grand Rue. Les maisons démolies dataient principalement du XVIIIe siècle.
1 rue de la Division Leclerc
Date de construction | 1936 à 1938 |
Maître d'ouvrage | Mrs E. et P. Frey en association avec les entrepreneurs Th. et Ed. Wagner à Strasbourg |
Architecte | Adolphe Wolff et Paul Riegert |
La façade est de style Art Déco par ses ferronneries (porte d'entrée, grilles des balcons), ou encore les chapiteaux des pilastres. Elle l'est aussi par le traitement original des fenêtres qui sont ébrasées à l'extérieur et par la forme en gradins des derniers niveaux. Une grande marquise se trouve le long de la façade qui suit la légère courbure de la rue de la Division Leclerc. Le rez-de-chaussée est surmonté d'un étage traité en entresol. Deux grands ressauts, sur deux travées, scandent l'imposante façade, un autre se trouve sur la façade latérale vers la rue Gutenberg. Les nombreux pilastres sont tous en grès rose, soulignant les lignes verticales de l’édifice.
Au sixième étage se trouve un long balcon filant, en grès, avec balustrades aux balustres cylindriques.
L'ensemble est dans le style Art Déco caractéristique de cette période, mais avec des lignes qui restent classiques et rectilignes.
Démolitions pour construire cet immeuble :
Démolition du 136 Grand Rue en 1934, ce qui fragilise le n°138, mitoyen. L’immeuble, en deux parties, a été construit vers 1730. Le bâtiment principal conserve encore des pignons à redents mais la façade est une reconstruction. La façade du premier étage du plus petit bâtiment a été réutilisée dans un bâtiment à Illkirch, 143 route de Lyon.
Démolition du 138 Grand Rue, ancien Poêle des Maréchaux, inscrit au titre des MH en date du 16/02/1930. Cette maison possédait de belles galeries richement sculptées qui ont pu être remontées au Musée de l’Oeuvre Notre Dame (Cour des Maréchaux) grâce à l’intervention de Hans Haug, conservateur dans les musées de la Ville de Strasbourg. Le bâtiment est démoli en 1936.
2 rue de la Division Leclerc
Date de construction | Environ 1938 |
Maître d'ouvrage | SCI en formation rep par. Jean Muller |
Architecte | Eugène Rohmer |
Un premier projet réalisé par Timothée Helmlinger (1901-1952), vers 1938, ne verra pas le jour. Il comportait sept étages avec un dernier niveau en retrait, surélevé, prenant l’allure d’une tourelle en attique. Plusieurs riverains, situés dans l’étroite rue de la Chaîne, s’attaquent à ce projet jugé trop imposant, les privant « d’air et de lumière ». Malgré l’appui de la municipalité, l’architecte abandonne son projet.
Ce projet sera repris dans la foulée par Eugène Rohmer (1905-1982), un architecte que Timothée Helmlinger connaissait puisqu’ils ont fait leurs études ensemble à l’école régionale d’architecture. Le nouveau projet a un aspect moins moderne au niveau de la tour d’angle.
Des arcades font leur apparition en bas de l’immeuble et fileront jusqu’au pont Saint-Nicolas de ce côté de la rue. Ces arcades avaient été prévues par Fritz Beblo, l’architecte en chef de la Ville jusqu’en 1918, mais dans un style moins moderne35.
L’immeuble est aménagé en retrait des anciennes constructions permettant d’aménager une placette mettant en valeur la maison 134 Grand Rue, datée du XVIe siècle.
La façade donnant sur la placette est étroite, elle ne comporte que deux travées, sur sept étages, donnant un aspect élancé à l’immeuble, bien visible depuis la rue des Francs Bourgeois, jouant une fonction de repère urbain. L’immeuble s’inscrit dans le modernisme, tout en conjuguant ferronnerie Art-Déco et parements en grès pour les deux premiers niveaux.
Cette façade rappelle de façon troublante, en la modernisant, l’immeuble néoclassique (fin XVIIIe) à l’angle des rues des Grandes Arcades et Frédéric Piton, dont la façade élancée donne sur la place Kléber (4 rue des des Grandes Arcades). Sachant que les arcades de la Grande Percée s’inspirent de la rue des Grandes Arcades, il est probable que cet immeuble ait servi de référence à cet emplacement, comme une citation du vieux Strasbourg.
Tout au long de sa carrière, Eugène Rohmer réalisera des constructions s’inscrivant dans le néoclassicisme ou l’Art-Déco et parfois des éléments modernes proches de l’école de Paris, avec la présence de bow-windows géométriques.
4-6 rue de la Division Leclerc
Date de construction | 1954 à 1956 |
Maître d'ouvrage | Société en copropriété "Division Leclerc" |
Architecte | Eugène Rohmer |
La façade se trouve dans le prolongement du 2 rue de la Division Leclerc construit 15 ans plus tôt par le même architecte. Elle reprend l'essentiel des codes de l'immeuble précédent. On trouve ainsi une continuité des arcades au rez-de-chaussée, surmonté d'un entresol. Les deux premiers niveaux sont revêtus de parements en grès des Vosges. Dans les étages, les quatre travées centrales sont compartimentées en seize cellules comportant des balcons. Cette structure géométrique, largement visible, est le seul élément réellement moderniste de cette façade (dont on pourrait penser qu’elle dédouble de façon allégorique la structure de l’immeuble). Au cinquième étage se trouve un balcon filant prolongeant celui situé au n°2.
Contrairement à l'immeuble du n°2, toutes les ouvertures vers la rue de la Division Leclerc ne possèdent pas d'encadrements en pierre, et les encadrements, lorsqu'ils existent, sont lisses. Les ferronneries des balcons sont par ailleurs dépourvues du style Art Déco visible au n°2.
A l’arrière un volume beaucoup plus discret est accolé, ne comportant que deux niveaux pour s’adapter au gabarit de la rue de la Chaîne, autrement plus étroite que la rue de la Division Leclerc.
8 rue de la Division Leclerc
Date de construction | 1954 à 1956 |
Maître d'ouvrage | Société civile immobilière des Nouvelles Arcades |
Architecte | Albert Sensfelder |
Immeuble dans la continuité du 4-6 rue de la Division Leclerc, formant l’angle avec la rue des Serruriers. La dernière travée rue des Serruriers comporte un étage de moins pour mieux se fondre dans le gabarit plus réduit de la rue. On a pris soin de conserver la maison mitoyenne, 17 rue des Serruriers (1606), dont l’oriel, visible depuis la rue de la Division Leclerc, est inscrit à l’Inventaire Supplémentaire des MH en date du 18/06/1929.
A partir du deuxième étage, la partie centrale de chacune des deux façades sur rue est en encorbellement sur quatre étages. Le sixième étage est en attique et possède une terrasse filante. L'architecture de l'immeuble respecte le style des immeubles voisins construits en 1934 par l'architecte Paul Dopff.
Cet immeuble a été construit par Albert Sensfelder, auteur de plusieurs réalisations régionalisantes jusqu’en 1957. Ensuite ses constructions s’inscriront davantage dans le modernisme. Il réalise deux constructions sur la 2e tranche et d’autres encore sur la 3e tranche.
Démolitions : plusieurs maisons du XVIIIe siècle
3 Rue de la Division Leclerc
Date de construction | 1933 à 1935 |
Maître d'ouvrage | René Hauss, imprimeur, rue de l'Ail |
Architecte | Henri Risch et Frédéric Herveh |
Le premier projet envoyé par les architectes est annoté par la commission municipale des Beaux-Arts. Après s’être mis en rapport avec l’architecte de la Ville, Paul Dopff, les façades sont remaniées. La commission fait également des observations concernant le choix des matériaux et la couleur du crépi pour les façades donnant sur la rue.
Descriptif :
Immeuble des années 1930 aux lignes néoclassiques avec quelques éléments Art Déco dans les ferronneries des balcons. On retrouve également quelques éléments stylisés caractéristiques de ce style dans les modillons, les chapiteaux des pilastres ou les gardes corps de forme cylindrique des balustrades en grès au deuxième étage. La façade principale donne sur la rue de la Division Leclerc, l'immeuble fait l'angle avec la rue des Serruriers.
Le rez-de-chaussée et l'entresol possèdent un appareil en grès tandis que les étages alternent crépis pour les surfaces opaques et grès pour le décor et les encadrements de fenêtres. Le rez-de-chaussée est surmonté d'un entresol dont les dimensions des ouvertures sont les mêmes que pour les étages. Des commerces se trouvent au rez-de-chaussée. On signalera que depuis l'origine une brasserie se trouve dans l'angle. L'immeuble mitoyen, au n°1 (1935-36), présente plusieurs similitudes, mais il s'agit de deux architectes différents.
Dès 1935 la « Brasserie des Serruriers » (Schlosserstub) prend place dans le local commercial à l'angle avec la rue des Serruriers. Cette brasserie existe toujours dans nos jours dans un cadre proche de celui d’origine, elle est surmontée des enseignes « Brasserie La Schloss – La taverne des serruriers ». Les architectes Henri Risch (1891-1983) et Frédéric Herveh (1882-1959) ont collaboré pendant plus de vingt ans. Leur production est quasiment exclusivement composée de bâtiments de ce style néoclassique. D’ailleurs le logo de leur association était une colonne dorique tronquée, ce qui devait annoncer la couleur aux éventuels commanditaires… Ils réaliseront également deux autres bâtiments du même style au niveau de la 3e tranche de la Grande Percée.
Démolition 25 rue des Serruriers (Hôtel Brackenhoffer) :
Pour construire ce vaste immeuble, il a fallu détruire un bel hôtel particulier situé au n°25 rue des Serruriers, construit vers 1787 pour Jean-Nicolas Pasquay. Bien qu’inscrit à l’Inventaire Supplémentaire des MH le 23/12/1932, l’hôtel fut déclassé le 22/05/1933.
Techniquement la conservation sur place aurait été possible, mais elle aurait laissé apparent le long de la nouvelle rue, selon la Ville, un vaste pignon inesthétique. D’après l’alignement légal issu de la DUP du 5 avril 1930, il aurait été difficile, vue l’étroitesse de la parcelle, d’y élever un immeuble, mais il aurait tout à fait été possible d’ériger entre le pignon aveugle de l’Hôtel particulier et la nouvelle voie une loggia ou une galerie avec des arcades rappelant celles construites plus tard de l’autre côté de la rue. Ce type de projet esthétisant, mais nécessitant une dépense d’argent, n’a pas été évoqué.
Le maire demande, à l’occasion du déclassement de cet immeuble, le déclassement des autres immeubles inscrits sur le tracé, jusqu’à la place de la Bourse, car ceux-ci l’ont été après que la Grande Percée ne soit décidée. Un changement de tracé serait trop coûteux.
La démolition dénote aussi la dimension économique de la Grande Percée, puisque le nouvel ensemble permet de rentabiliser la parcelle contrairement à l’ancien hôtel qui était peu dense. Plusieurs éléments de l’ancien hôtel ont été déposés. Le Musée des Arts Décoratifs a reçu : la grande grille sur rue, la grande grille du balcon, boiserie d’alcôve, une cheminée et son trumeau et d'autres boiseries.
cliché au début des années 1930, l'ancien hôtel est au deuxième plan avec l'inscription verticale Handel Schule. Au premier plan à droite avec ses bâtiments en U, le n°27
Démolition dans ce secteur
8 maisons : 136, 138 Grand Rue, 4, 6 rue de la Chaîne, 19, 21, 23 et 25 rue des Serruriers
10-12-14-16-18 rue de la Division Leclerc (Blob B)
Date de construction | 1933 à 1935 |
Maître d'ouvrage | Office Public d'Habitations à Bon Marché (OPHBM) de Strasbourg |
Architecte | Paul Dopff (architecte en chef à la Ville de Strasbourg) |
Cet immeuble fait partie d’un ensemble plus vaste qui devait à l’origine comprendre trois bâtiments (Bloc A, B et C). Seul les Bloc B et C ont été construits, celui-ci et l’immeuble dans le prolongement aux n°20-24 (Bloc C), construit à la même période. Le descriptif des plans et façades réalisés côté rue se trouve au niveau du Bloc C.
En 1929, le conseil municipal donne son accord de principe à l'OPBHM de Strasbourg, pour prolonger la Grande-Percée.
Ces réalisations ont été rendues possibles par la loi Loucheur du 13 juillet 1928 qui donne de nouvelles marges de manœuvre financières à l'Office HBM en permettant de louer à des loyers moyens, permettant aussi de diversifier le type d'habitat et de population.
Le bloc A situé en face ne sera pas réalisé d’abord pour des raisons financières, puis en raison de la seconde guerre mondiale.
L’arrière de l’édifice prend place rue du Puits, de faible gabarit et conservant plusieurs bâtiments anciens. Des corps de bâtiments se détachent de la façade principale sous forme de gradins, contrastant avec l’aspect massif du bâtiment côté rue. Ces gradins, bien que quadrangulaires, ne sont pas sans évoquer ceux de l’architecte Roger-Henri Expert, dans une école rue Küss à Paris en 193336. Deux rotondes, percées de pavés de verre pour laisser rentrer la lumière, sont également implantées au niveau des rez-de-chaussée, situés à l’arrière, entre les gradins. Ces dômes surbaissés ne sont pas visibles depuis la rue. La partie immeuble arrière s’insère de façon harmonieuse avec les bâtiments mitoyens, le 4 rue du Puits (XVIIIe siècle) et le 7 rue de l’Ail (1774, modifié au XIXe) dont le médaillon sculpté surmontant l’entrée est Inscrit sur la liste supplémentaire des MH (en date du 13/06/1929).
5-7 et 9-11 rue de la Division Leclerc
Date de construction | 1956 à 1958 |
Maître d'ouvrage | Société Coopérative de Reconstruction (SCR) |
Architecte | Charles Gustave Stoskopf, architecte conseil pour la construction (MRU) Paul Dopff, architecte en chef du MRU pour la Ville de Strasbourg |
Cet ensemble immobilier comprenant deux immeubles a été construit à l’emplacement du Bloc A, évoqué ci-dessus (n°10-18), qu’aurait dû réaliser Paul Dopff pour le compte de l’OPHBM.
Les immeubles de ce secteur ont été démolis dès les années 1930. Parcelle non bâtie à la veille du second conflit mondial, le secteur sera néanmoins sévèrement bombardé en 1944, démolissant plusieurs maisons situées à l’arrière de la parcelle.
Dès 1946, des baraquements provisoires sont construits par l’architecte Paul Widmann pour accueillir des commerces. Les baraques devaient être évacuées dans un délai de six mois en cas de notification par l’OPHBM, toujours bénéficiaire d’un droit à construire.
Finalement la parcelle sera bâtie par le Ministère de la Reconstruction et de l’Urbanisme (MRU) en raison des dommages de guerre et des personnes sinistrées à reloger, réunis dans une Société Coopérative de Reconstruction (SCR).
Les deux immeubles sont préfinancés à l’aide des fonds dommages de guerre.
Vers 1949, l’architecte conseil pour la reconstruction Charles-Gustave Stoskopf visite ce secteur avec Jean Clément, directeur départemental de la construction. Parmi les ruines, il découvre une vue sur une ancienne maison avec pignon à gradins. Il propose alors un plan masse tenant compte du site où sera implanté l’immeuble. A l’origine, le projet devait être d’un seul tenant37, il impose alors une échancrure aboutissant à deux bâtiments, créant ainsi une rue aboutissant sur l’impasse du Paon38.
L’architecte réalisera une perspective artistique, non datée, mais qui montre bien qu’il tenait à dégager la vue sur les maisons anciennes et la cathédrale en toile de fond.
Le plan masse sera encore modifié en décembre 1951 par Stoskopf, avec également des plans en élévation des façades, proches de l’état actuel.
Le projet est scindé en deux lots, réalisés par deux architectes d’opérations :
- lot 1 : n°5-7 rue de la Division Leclerc, aux angles avec le 16 rue des Serruriers et le 6 rue du Paon, par l’architecte Claude Misbach
- lot 2 : n°9-11 rue de la Division Leclerc, à l’angle avec le 15 rue de l’Ail, par l’architecte Charles Gustave Wolff
Le projet se fait sous la supervision de l’architecte du MRU pour la Ville de Strasbourg, c’est à dire Paul Dopff. Deux ailes, donnant sur la rue du Paon sont ajoutées au plan de Stoskopf. Elles assurent la transition avec les maisons plus anciennes à l’arrière. Le dossier d’archive de la Ville ne conserve pas les plans d’étages, il est donc difficile de dire si ces ailes ont été ajoutées par Paul Dopff ou à l’initiative des architectes d’opérations. Sur les plans de situation datés de 1952 et 1953, avec ces nouvelles ailes, on retrouve le nom de Paul Dopff au coté des deux architectes d’exécution. On notera cependant que Paul Dopff, dans ses autres réalisations pour la Grande Percée, a pris soin de soigner ses transitions avec le bâti environnant.
Descriptif des nouveaux immeubles :
Les bâtiments s’insèrent élégamment dans le bâtiment existant et maintiennent une fonction urbaine avec au rez-de-chaussée des commerces avec larges vitrines. Au dessus se trouve un entresol comportant également des activités commerciales. Dans les étages se trouvent des logements de type trois pièces. Le dernier niveau comporte un balcon filant sur toute la longueur de la façade. Les étages sont revêtus d’un parement en pierre calcaire de forme quadrangulaire.
Au premier abord, le plan des façades ressemble à ceux d'autres bâtiments construits à la même période lors de la reconstruction en France, comme par exemple au Havre par Auguste Perret. Néanmoins ce rapprochement est à nuancer dans la mesure où des adaptations au contexte local ont été prises, en ménageant des vues depuis la rue du Paon sur le vieux Strasbourg, mais aussi avec la création d'immeubles de transition au niveau des ailes de la rue du Paon, mesure propre à l'ensemble de la Grande Percée.
Les immeubles donnant à l’arrière de la rue du Paon sont en partie des reconstructions. C’est le cas pour le 5 rue du Paon (1683), reconstruit après guerre et l’Hôtel de l’Épine (1737), 9 rue de l’Épine, dont la partie arrière donnant sur l’impasse du Paon, semble être une reconstruction après la seconde guerre. Cet Hôtel a été classé MH le 03/05/1946 sans doute pour en assurer la pérennité.
la rue du Paon sépare les n°5-7 du n°9-11 et ménage une vue sur des bâtiments anciens et la flèche de la cathédrale
17 rue de l’Ail (mitoyen) :
Le 17 rue de l’Ail est une reconstruction après guerre en raison des dégâts provoqués par le bombardement de 1944. A l’origine il avait été préservé par la Grande Percée. Il s’agissait d’un immeuble comportant une chapelle d’époque romaine, avec une façade transformée à la Renaissance et un portail datant de 1730. La maison était inscrite sur l’inventaire supplémentaire en date du 13/06/1929 (portail et chapelle romane). Le nouvel immeuble a été reconstruit en 1958 par Auguste Haezentler (fils), seul le portail a pu être préservé, il a été remonté dans la cour.
Démolitions dans ce secteur
20 maisons : 12, 14, 16 rue des Serruriers, 6, 8 rue du Puits, 1 à 9 rue de la Lie, 2 à 12 rue de la Lie. 9, 11, 13, 15 rue de l’Ail. La rue de la Lie est entièrement supprimée.
Parmi les édifices remarquables supprimés, on signalera le 14 rue des Serruriers, maison du XVe (vers 1400) avec pignons à redents et encorbellements.
14 rue des Serruriers, suivi du n°12 (démoli). On reconnaître ensuite le n°10 qui existe toujours
vue depuis l'ancien 25 rue des Serruriers (Maison Brackenhoffer)
20-22-24 rue de la Division Leclerc et 7 quai Saint Thomas (Bloc C)
Date de construction | 1933 à 1935 |
Maître d'ouvrage | Office Public d'Habitations à Bon Marché (OPHBM) de Strasbourg |
Architecte | Paul Dopff (architecte en chef à la Ville de Strasbourg) |
Cet immeuble correspond au « Bloc C », situé dans le prolongement du « Bloc B » que nous avons déjà traité.
Malgré les importantes démolitions dans ce secteur, le nouvel immeuble s’insére dans son environnement. La façade principale comporte six étages alors que le corps de bâtiment accolé dans l’angle n’en comporte que trois sous la corniche. Le pignon triangulaire du nouveau bâtiment donnant sur la rue de l’Ail imite celui situé au n°16 rue de l'Ail dans un bâtiment beaucoup plus ancien datant du XVIe siècle.
A l’angle avec le quai et la rue de la Division Leclerc l’immeuble est en retrait sur cinq travées, créant ainsi une rupture évitant de créer une façade trop longue. Ce retrait a permis d’aménager une grande terrasse pour les logements surmontant l’entresol. Les étages possèdent tous un balcon filant. La façade donnant sur le quai Saint Thomas est dans la continuité, tout en le simplifiant, de l’immeuble mitoyen au n°6, construit vers 1840. Cette façade, quoique sobre et moderne, s’inscrit dans une forme de classicisme. On y trouve un rez-de-chaussée surmonté d’un entresol avec parement en grès. Les étages sont généreusement percés de multiples fenêtres avec balcons filants. Des bandeaux séparent l’entresol et le dernier étage, il s’agit avec les encadrements de fenêtres des seules modénatures. Comme son voisin plus ancien, la toiture est percée de lucarnes.
La lecture des deux immeubles de Dopff est complexe car ils possèdent un épannelage varié qui cherche à s’intégrer à leur environnement, aussi bien au niveau des façades principales que côté cour pour la façade en gradin donnant rue du Puits (« Bloc B »). Le traitement des façades est à la fois régionaliste (arcades, aspect des toitures, parement en grès roses pour le sous-bassement, contextuel dans le traitement des angles), classicisant (bandeaux, balcons filants, tri-partitions des façades, symétrie) et moderne (structure en béton, style des baies, géométrie des gradins côté cour).
Descriptif selon les plans types de 1914 (Beblo), puis 1920 (Dopff) et la réalisation finale :
Dès 1914 un plan type est établi par l’architecte en chef de la Ville, Fritz Beblo, pour la 2e tranche de la Grande Percée. Les arcades sont censées évoquer le Strasbourg vernaculaire, en particulier la rue des Grandes Arcades. Suite au départ de Beblo après la guerre, ce plan sera repris, en le simplifiant, par son successeur Paul Dopff, en 192039. Ce plan de style néoclassique, quoique d’allure stricte, traduit l’influence des cours de l’école de Karlsruhe, et les réminiscences néoclassiques empruntées à Friedrich Weinbrenner (1766-1826)40.
L’historien de l’architecture, Wolfgang Voigt, note que les réalisations de l’architecte sont influencées également par son professeur à l’école de Karlsruhe, Friedrich Ostendorf (1871-1915), qui défendait la simplification. Pour lui le véritable but de l'architecture était la création d'espace et non de monuments architecturaux41. Les immeubles finalement réalisés pour l’OPHBM seront encore davantage simplifiés par rapport à ce plan type, retirant toute ornementation pour ne garder que les volumes et une adaptation au bâti existant.
Dans son rapport d’activité d’activité 1924-1934, l’OPHBM de Strasbourg écrit que « le problème qui se posa pour l’architecte fut très difficile à résoudre. Il fallait faire s’harmoniser le moderne avec l’ancien, c’est à dire des bâtiments de grande envergure construits selon les principes du XXe avec le cachet si pittoresque des vieux quartiers »42.
Nous nous risquons à qualifier ces façades de « régionalisme rationnel » mais ce n’est qu’une hypothèse. On l’a bien compris, cet ensemble est difficile à définir dans un style bien déterminé, ni vraiment moderne, ni vraiment régionaliste. Les bâtiments s’insèrent au mieux dans le bâti environnant, selon le programme et le budget imparti, reflétant aussi une forme de pragmatisme. La diversité des volumes, retraits, différences de hauteurs, présence de balcons filants, donne l’impression que l’on a affaire à plusieurs immeubles plutôt qu’un ensemble homogène, ce qui en complexifie l’appréhension.
Démolitions dans ce secteur
9 maisons : 18, 20 rue de l’Ail, 1, 3, 5, 7 rue du Bateau. La rue du Bateau est intégralement supprimée, 7, 8 et 9 quai Saint-Thomas.
Les démolitions patrimoniales sont nombreuses dans ce secteur, mais avec une exception pour la parti est de la voie puisqu’elle est intégralement préservée. Ainsi on peut encore admirer une belle maison avec pignon Renaissance (datée de 1586 n°1-3 rue de la Douane), une maison avec pignon gothique (vers 1400) au 17 rue de la Division Leclerc et une maison datée de 1716 au n°15. Cet îlot sauvegardé est une quasi exception avec les n°9-15 rue des Francs Bourgeois qui avait été préservé par la Grande Percée, mais bâti ultérieurement.
Côté ouest par contre on déplore plusieurs démolitions, en 1932, de constructions remarquables :
- 18 rue de l'Ail, belle maison gothique du XVe avec pignon à redents. Les boiseries gothiques sont remployées dans le « Hirschhof » lors de l’agrandissement du Musée de l'Oeuvre Notre-Dame. Un article de journal s’indigne de cette démolition résultat du programme de l’administration allemande (1870-1914). Pourtant, dans un contre-article, non publié, Paul Dopff prends clairement position pour la démolition en soulignant que Strasbourg n’est pas une ville musée, et, comme le maire Rudolff Schwander un quart de siècle plus tôt, que les problèmes sociaux et d’insalubrité doivent impérativement être résolus par la percée43.
- 20 rue de l’Ail, 7 rue du Bateau : Maison datée de 1698 avec encorbellement et bel escalier sculpté. Elle est inscrite Ismh le 25/06/1929 (façades, toitures et l’escalier sur cour). Déclassé par un arrêté du 07/07/1932. L’escalier remarquable dans la cour a normalement été conservé, mais où ? (réserve des musées ?). Une maquette avec colonne corinthienne (datée de 1840) et une fontaine du XIXe ont normalement été conservées d’après le relevé de 190744.
- 7 quai Saint Thomas (Hôtel de l’Esprit). Ancien hôtel de l’Esprit, cité dès 1306, puis reconstruit entre 1769 et 1786. Herder et Goethe y ont logé en 1770. L’intérieur du premier étage, comprenant un ancien salon de musique que l’on peut voir en photographies datait encore du XVIIIe avant sa démolition. A priori aucun élément n’a été sauvegardé.
Pont Saint-Nicolas
Date de construction | 1935 |
Maître d'ouvrage | Ville de Strasbourg |
Architecte | probablement le service municipal d'architecture |
L’ancien Pont Saint-Nicolas était situé à cet emplacement depuis 1895. La structure du pont, en fonte, est plus ancienne puisque le pont était autrefois situé au niveau du pont du Corbeau, depuis 1841 (système de l’Ingénieur Camille Polonceau) démonté en 1890, il a été remonté au niveau de l’actuel pont Saint-Nicolas entre 1892 et 1895.
Démolition de l’ancien pont en fonte vers 1935. Le nouveau pont, construit la même année, en pierre, est plus large, il accompagne les travaux de la Grande Percée et assure la continuité avec la 3e tranche jusqu’à la place de la Bourse.
4. Morphologie de la 2e tranche
Nous avons déjà abordé dans le 1er chapitre le tracé, sinueux et ménageant des vues sur le patrimoine selon les conceptions pittoresques de Camillo Sitte. Dans ce chapitre, nous nous attarderons à préciser la typologie des nouveaux bâtiments puis tenterons de définir les différents courants architecturaux des différents îlots. Enfin nous verrons comment les nouveaux bâtiments s’articulent avec les anciens, dans une tentative de mise en scène du patrimoine, pour essayer de dégager une morphologie générale de cette 2e tranche.
Typologie des nouveaux bâtiments et leurs commanditaires
Les nouveaux bâtiments possèdent une typologie variée, on y trouve ainsi : cinéma, logements privés et sociaux, hôtel, commerces, banques, bureaux. Les maîtres d’ouvrages sont des investisseurs et des sociétés publiques, Office Public d’Habitation à Bon Marché ou Ministère de la Reconstruction.
Contrairement à la première tranche, la Ville ne fera pas appel à une banque pour la commercialisation des parcelles et le financement des nouveaux immeubles45. Cela se reflète dans la diversité des constructions46. Alors que l’usage du bail emphytéotique, en séparant le terrain du bâti47, était fréquent sur la première tranche, il est rare sur la 2e tranche (seulement 3 opérations dont 2 pour l’OPHBM de Strasbourg). Cela reflète aussi un changement de pratique entre l’Allemagne et la France. Les plus grosses opérations avec bail emphytéotique sont celles réalisées par l’Office Public d’Habitation à Bon Marché, avec les Blocs B et C. La quasi totalité des autres immeubles ont été financés en totalité, terrain et bâtiment, par des investisseurs, sous forme de Société Civile Immobilier (SCI) ou en nom propre, ou par l’État sous forme d’immeuble préfinancé en raison des dommages de guerre (5-7 et 9-11 rue de la Division Leclerc). Certains immeubles étaient construits par des promoteurs en vue de revendre des lots de copropriété, comme c’est le cas pour le 4-6 rue de la Division Leclerc.
La Ville revendra donc directement les terrains après que ceux-ci aient été débarrassés des anciennes maisons. C’est donc une opération lourde financièrement pour la Ville, car elle doit financer les études, les acquisitions, les travaux d’assainissement et de démolition. Elle cherche ainsi à rentabiliser son investissement, ce qui se fait parfois au détriment du patrimoine. On pense ainsi à plusieurs immeubles qui ont été sacrifiés comme l’hôtel du XVIIIe situé 25 rue des Serruriers et les maisons 127 et 129 Grand Rue qui aurait pu être conservées. Ces deux derniers immeubles ont été démolis en vue de valoriser la parcelle située en face de l’immeuble « Strasbourg Building ». La parcelle sera proposée sous forme de bail emphytéotique à la « Société immobilière de la Grande Percée » (21 rue des Francs Bourgeois)48.
Avant 1939, la plupart des chantiers de la 2e tranche étaient achevés ou commencés. En dehors des immeubles commerciaux (hôtel, cinéma) ou à but de logements sociaux, les acquéreurs sont des investisseurs qui construisent les immeubles en bloc à titre d’investissement sous forme d’immeuble de rapport, avec logements, bureaux et commerces en location. On peut citer sept immeubles soit la moitié des réalisations de la 2e tranche, par exemple le « Strasbourg Building » 6 rue des Francs Bourgeois ou encore le 21 rue Francs Bourgeois. On pourra se reporter au tableau en annexe pour la liste complète des commanditaires.
Plusieurs chantiers ne seront lancés qu’après guerre. Le Bloc A qu’aurait dû bâtir l’OPHBM de Strasbourg n’ayant pas pu être financé, il sera finalement construit par le MRU dans les années 1950. De même pour les parcelles situées 4-6 et 8 rue de la Division Leclerc qui n’avaient probablement pas trouvé d’acquéreur avant la guerre. Elles seront bâties sous forme de copropriété (revente de logements en lots). Tous les bâtiments de logements construit après 1945 seront revendus par lots à des copropriétaires, reflet d’une époque où les investisseurs pour de gros immeubles de rapports sont moins nombreux.
Commerces :
On constate que de nombreux commerces ont conservé leur fonction d’origine. C’est le cas par exemple du cinéma Vox (17 rue des Francs Bourgeois, 1947) ou encore de l’Hôtel Maison Rouge (ancien « Nouvel Hôtel », 4 rue des Francs Bourgeois, 1927). La société de décoration d’intérieur Abry-Arnold existe depuis les années 1920, elle occupe le rez-de-chaussée des 2-4-6 rue de la Division Leclerc depuis leur construction (1938 pour le n°2 et 1956 pour les n°4-6).
La plus vieille brasserie se trouve au 3 rue de la Division Leclerc, depuis 1935 le nom de l’enseigne n’a quasiment pas changé « Brasserie des Serruriers » (Schlosserstub), devenu « Brasserie la Schloss » ou « Taverne des Serruriers ».
Tentative de classification architecturale des nouveaux bâtiments
Une maquette classicisante et idéalisée
Avant la percée, la ville fera réaliser deux maquettes datées de 1910 (état actuel) et 1916 (état projeté)49 montrant la 1ère tranche et une partie de la seconde (rue des Francs Bourgeois). Sur la maquette de 1916, on a une impression d’homogénéité. En réalité les élévations de cette maquette ne seront que partiellement respectées, sauf le tracé sinueux, puisque les réalisations tiendront bien davantage compte du bâti existant et en conserveront même des îlots entiers. Ce plan donnait une impression de classicisme se rapprochant des réalisations de Fritz Beblo avec les n°4-8 rue du Vingt-Deux Novembre (1916). Selon Michaël Darin, la maquette est à rapprocher de la disposition des percées parisiennes souhaitées par Haussmann en 1855, avec des îlots homogènes. L’auteur souligne également le rapprochement entre la composition des immeubles le long de la voie et le classicisme de la façade de l’Aubette. On notera aussi l’usage du grès rose pour les façades50.
Quand on compare la maquette projetée (1916) avec le plan projet de percée, réalisé à la même période, en 1910, on constate que les vues de Beblo sont contradictoires. Dans l’un il semble faire table rase du bâti ancien le long de la voie, dans l’autre il conserve des îlots entiers. Cette maquette paraît plus théorique, « idéalisée » que correspondre à la réalité de l’aménagement et ses nécessaires arbitrages patrimoniaux.
Finalement, contrairement aux vœux de Dopff, les réalisations de la 2e tranche n’auront pas l’homogénéité de la rue de Rivoli, au contraire les réalisations seront encore plus hétérogènes que celles de la 1ère tranche. On peut distinguer quatre séries de courant architecturaux dans lesquels s’inscrivent les nouveaux bâtiments. Ces séries ne s’inscrivent pas seulement dans une période à laquelle on pourrait associer un style selon l’effet de mode du moment. C’est en visualisant les bâtiments dans leur contexte urbain, et non individuellement, au-delà de l’année de construction, du plan des façades et des différentes sensibilités des architectes, qu’ils donnent parfois une impression d’ensemble qui aurait été réfléchi en amont des réalisations. On trouvera donc dans ces séries, des ensembles homogènes et des objets isolés que nous avons tenté de classifier.
« Série classicisante »
La première série comprend d’abord les trois premières réalisations jusqu’à 1930 (4, 5 et 6 rue des Francs Bourgeois). Ces immeubles sont classicisant et se trouve directement dans la continuité de la première tranche. On y trouve les ingrédients de ce style : pilastres, balcons filants, modénatures, vases, frontons, lucarne en toiture etc.
On peut également ajouter dans cette série les deux immeubles 1 et 3 rue de la Division Leclerc, construits plus tardivement (1938 et 1935), classicisants également mais avec des motifs Art-Déco sous forme de bas reliefs en grès ou de ferronneries.
Trois des cinq réalisations citées ont été réalisées par les architectes Adolphe Wolff et Paul Riegert.
« Série Art-Déco »
La deuxième série de bâtiments s’inscrit dans un style Art-Déco plus affirmé. Cette série comprend deux bâtiments, le Cinéma Vox avec quelques discrets éléments régionalistes (arcades). Le 21 rue des Francs Bourgeois s’inscrit davantage dans le mouvement Moderne, avec des motifs Art-Déco, sous forme de bas relief ou de ferronneries, mais aussi des concessions régionalistes (oriel et angle saillant prenant l’aspect d’une tour).
« Série régionalisante » : un régionalisme rationnel
La troisième série correspond à des ensembles régionalisants. C’est le cas de tous les bâtiments pairs rue de la Division Leclerc. D’abord les n°2 à 8, construits par deux architectes différents à deux période bien distinctes (n°2 en 1938 et n°4-6 et 8 en 1956) mais avec une évidente continuité. Les arcades rappellent le vieux Strasbourg mais aussi la façade d’angle élancée du n°2 qui évoque un immeuble XVIIIe situé place Kléber (4 rue des Grandes Arcades). Le n°2 a également des ferronneries Art-Déco.
Les deux autres ensembles de cette série régionalisante sont situés dans le prolongement, construit par l’architecte Paul Dopff pour l’OPHBM de Strasbourg, n°10-18 et 20-24 rue de la Division Leclerc, construits en 1934. Comme nous l’avons vu dans la description de ces immeubles, ils sont également influencés par un régionalisme tendant à la simplification, que j’ai qualifié de « régionalisme rationnel », ces arcades et le grès rose évoquant le vieux Strasbourg.
Ce vaste ensemble à arcades, aux n°2 à 24 rue de la Division Leclerc, d’une longueur de 250 mètres soit la moitié de la seconde tranche, même s’il est extrêmement sobre, correspond sans doute le mieux, par sa relative homogénéité à la vision que souhaitait Dopff pour l’ensemble de la Percée : c’est ici que le côté « rue de Rivoli » est le plus manifeste.
On notera que ces trois premières séries d’immeubles font un usage systématique du grès rose pour la pierre, mais avec de larges parties en crépis, pour des raisons d’économie, pour les façades lisses. Les rez-de-chaussée sont également fréquemment surmontés d’un entresol dans la continuité de la première tranche.
« Série moderniste »
La quatrième série marque une rupture mais avec deux cas de figure très différents. Le premier ensemble concerne les 5-7 et 9-11 rue de la Division Leclerc (1957), un ensemble d’immeubles rappelant les constructions du Havre d’Auguste Perret et s’inscrivant dans le modernisme, avec toit terrasse et des revêtements de façades en pierre calcaire étranger aux autres séries évoquées. Cependant la volumétrie des immeubles principaux donnant sur la rue de la Division Leclerc, le traitement des angles, et l’architecture des immeubles d’accompagnement dans l’impasse du Paon, font que ces immeubles sont plutôt bien intégrés au contexte local.
Le dernier immeuble s’inscrit également dans le modernisme, bien qu’il soit postérieur aux travaux de la Grande Percée (selon la DUP du 5 avril 1930), il s’agit du 9-15 rue des Francs Bourgeois (1972). La façade était autrefois revêtue de granit vert-argent un matériaux étranger au bâti vernaculaire. L’immeuble ne s’intègre pas particulièrement au bâti environnant, il marque donc une rupture dans son environnement. S’agissant d’une opération d’urbanisme, il avait surtout pour but, outre la création de bureaux à cet endroit, d’élargir les voies des rues perpendiculaires. Avec une hauteur de 22,80 mètres sous la corniche, il est également le seul à dépasser les 20 mètres, seuil qui avait été fixé en 1907, il est donc le plus haut de la rue.
Intégration du bâti et mise en scène
Continuité avec la 1ère tranche
La 2e tranche est dans la continuité urbanistique de la première tranche, bien que la qualité du bâti soit plus disparate. Les nouveaux immeubles, transformant le vieux Strasbourg, sont alignés le long d’un large boulevard ou prennent place des fonctions commerciales, de loisirs et de logements. La réalisation est conforme au programme et affirme Strasbourg dans sa volonté d’être une métropole moderne. Bien que le style des façades soit différent, notamment en raison de la diversité des architectes, des programmes et de la durée de la période de construction (plus de 40 ans entre la première et la dernière réalisation), une impression de monumentalité se dégage des nouveaux bâtiments.
Cette continuité avec la 1ère tranche est dûe à plusieurs motifs. D’abord Fritz Beblo avait réalisé un plan type en 1914 qui sera repris en le modernisant par son successeur Paul Dopff pour les constructions de l’OPHBM. Des arcades sont présentes à plusieurs reprises créant une continuité le long de la voie, du côté pair, rue de la Division Leclerc, censées évoquer le vieux Strasbourg (rue des Grandes Arcades). Ensuite le plan prévu en 1910 par Beblo est respecté sans changement jusqu’au Pont Saint Nicolas (et même jusqu’à la place de la Bourse), ce qui permet de conserver l’esprit initial du programme. Ce projet ne s’est pas fait sans difficulté puisque plusieurs bâtiments protégés à la hâte autour de 1930 par la commission des Monuments Historiques ont dû être déclassés par la Ville à travers la DUP. On perçoit bien dans les nombreux courriers d’archives que les démolitions de maisons anciennes n’étaient pas un plaisir pour la Ville51, c’était plutôt un moindre mal pour résoudre les problèmes d’hygiène et de circulation, qui s’est fait de façon méthodique et pragmatique, cherchant aussi parfois à économiser les deniers publiques en rentabilisant les parcelles. Dans les dossiers d’archives, on trouve plusieurs articles de presse s’indignant parfois de la démolition du vieux Strasbourg, cela n’a pas empêché les travaux de continuer.
Enfin il faut souligner que la poursuite des travaux s’est faite malgré le changement de nationalité et de réglementation (après 1918 l’Alsace redevient française) et deux guerres mondiales. Le Bauordnung de 1910 est quasiment repris en l’état par le règlement de 192352. Ensuite au niveau politique la construction sur près d’un demi-siècle implique des changements importants au niveau municipal, qui n’auront pourtant que peu d’impact sur la poursuite des réalisations, si ce n’est des retards. On peut résumer les changements de mandature ainsi (j’omets la période 1940-45 pendant laquelle la Grande Percée était à l’arrêt) :
Maire (date d’activité), parti ou couleur politique | Architecte en chef / directeur du service d’architecture ou Directeur Général des Services Techniques ayant participé aux décisions à propos de la Grande Percée (date d’activité) |
Rudolf Schwander (1906-1918), social démocrate | Fritz Beblo (1903-1919) |
Jacques Peirotes (1919-1929), socialiste | Paul Dopff (1919-1954) |
Charles Frey (1935-1940 puis (1945-1955), radical-socialiste puis RPF | idem |
Charles Altorffer (1955-1959), RPF | Georges Laforgue (1955-1966) |
Pierre Pflimlin (1959-1983), Mouvement républicain populaire puis Centre démocrate | idem |
Intégration des nouveaux bâtiments dans l’existant
A ce sujet, l’intégration des nouveaux immeubles, leur raccord avec les anciens mais aussi les vues dégagées permettent de montrer que la ville ancienne n’était bien souvent pas niée, bien au contraire. Malgré tout , le nouveau bâti s’intègre plus ou moins heureusement dans l’ancien. Les pignons ne se raccordent pas toujours correctement avec les bâtiments anciens, c’est notamment le cas au 21 rue des Francs Bourgeois (1934, Edmond Picard) où l’immeuble semble jaillir entre deux immeubles anciens préservés. Le traitement du 1 rue de la Division Leclerc (1938, Adolphe Wolff & Paul Riegert), dans sa jonction avec l’immeuble XVIIIe de la rue Gutenberg laisse aussi à désirer, laissant visible un pignon nu sur trois étages.
Autre exemple malheureux, mais lié à la période de construction cette fois-ci, le n°9-15 rue des Francs Bourgeois (1972, Albert Sensfelder), non prévu dans les plans de 1910 et la DUP de 1930. L’immeuble semble nier les constructions mitoyennes, déconnecté du bâti et autonome, témoin aussi de l’arrogance de son époque où l’on faisait parfois peu de cas du patrimoine. Heureusement son aspect monumental s’accorde dans son échelle avec les nouvelles constructions même si son revêtement extérieur est étranger (aussi bien l’ancien que le nouveau après rénovation). Les commerces en rez-de-chaussée sont toutefois les bienvenus, assurant son intégration urbaine.
A l’opposé, dans bien des cas, l’intégration est particulièrement remarquable. Rappelons que la commission des façades (Kunstkommission ou commission des Beaux Arts) validait les plans des façades et que l’architecte Paul Dopff a souvent fait des recommandations aux architectes lorsque les plans n’étaient pas approuvés, cela a contribué à la qualité et à l’intégration du bâti.
On peut citer plusieurs exemples, dont l’un discret au 8 rue de la Division Leclerc (1956, Albert Sensfelder), dans sa jonction avec l’immeuble situé 17 rue des Serruriers, la dernière travée fait un étage de moins que celle située côté rue. Nous pouvons citer deux autres exemples remarquables, qui s’insèrent de façon contextuelle au bâti. D’abord l’immeuble de Paul Dopff pour l’OPHBM au n°20-24 rue de la Division Leclerc (1935) où il insère à l’angle avec la rue de l’Ail un corps de bâtiment dont la toiture mime celle de l’immeuble mitoyen datant du XVIe siècle, dédoublant ainsi sa voisine dans une juxtaposition anachronique53.
Autre exemple, plus discret, les deux immeubles réalisés après guerre, pour le MRU, au 5-7 et 9-11 rue de la Division Leclerc (1957, Charles Gustave Wolff, Claude Misbach). Si les architectes d’opérations sont biens connus, il est bon de rappeler que des esquisses des plans en élévation ont été réalisés par l’architecte Gustave Stoskopf, alors architecte-conseil de la construction. Mais c’est surtout de l’apport de Paul Dopff, également architecte en chef du MRU à la Ville, dont nous pensons que les plans ont bénéficié. Dans les angles avec la rue du Paon, des bâtiments du style de l’architecture d’accompagnement ont été ajoutés (arcades au rez-de-chaussée, toiture avec lucarnes, bâtiment de dimension intermédiaire). Ces bâtiments de transition ne figurent pas dans les esquisses de Stoskopf. N’ayant pas trouvé le permis de construire avec les plans d’origines54, il est difficile de dire qui de Stoskopf, Dopff ou des architectes d’opérations en est à l’initiative, mais vu l’implication de Dopff et du service de la Ville sur chacun des projets de la Grande Percée, nous pensons plutôt à son service plutôt que celui de Stoskopf déjà bien occupé par ailleurs.
L’arrière des immeubles, donnant sur le bâti ancien n’est pas en reste, s’intégrant au mieux à son environnement. On peut citer par exemple le 5 rue des Francs Bourgeois (1925, Paul Riegert et Adolphe Wolff) et le 4-6 rue de la Division Leclerc (1956, Eugène Rohmer). Dans ces deux cas, on a l’impression qu’un nouveaux bâtiment a été accolé à l’arrière de l’édifice. Le cas le plus remarquable pour son intégration du bâti sur l’arrière, côté rue du Puits, ce sont les fameux gradins du 10-18 rue de la Division Leclerc par Paul Dopff pour l’OPHBM.
Mise en scène du patrimoine
Enfin, il faut signaler la volonté de mise en scène55 du patrimoine, visible tout le long de la nouvelle voie. Ce principe de création de point de vue, théorisé par Camillo Sitte dans l’ouvrage déjà cité L’Art de bâtir des villes (1889), où le piéton est observateur, était connu de Fritz Beblo. Paul Dopff, dans la poursuite des travaux, reprendra à son compte ces principes, ainsi que, nous le verrons dans cette synthèse, d’autres architectes. L’aspect sinueux de la voie, selon les principes de Sitte facilite l’aspect mis en scène en ménageant pour le piéton des « effets de surprises ». Signalons aussi qu’au niveau de la Grand Rue la voie est surélevée en raison de la topographie de Strasbourg, suggérant des points de vue différents selon d’où l’on vient.
En partant de la place Kléber, je détaille de façon chronologique la mise en scène qui attend le piéton, au premier ou au second plan du théâtre de ce cheminement architectural, ménageant un dialogue entre nouveau et ancien bâtiment.
Il y a d’abord la mise en valeur du 5 rue des Chandelles, un édifice à colombages du XVIe siècle, bien visible entre les n° 5 et 9-15 rue des Francs Bourgeois.
Un peu plus loin au niveau du cinéma Vox, Paul Dopff demande à ce que la façade le long de la rue du Vieux Seigle laisse visible la vieille tour datée du XIVe située au n°6. Dans le prolongement de la tour, c’est la flèche de la Cathédrale qui est visible.
Ensuite c’est une placette qui est aménagée, à l’angle entre la Grand Rue et la rue de la Division Leclerc, ménageant une vue sur 134 Grand Rue, une belle maison du XVIe siècle sciemment conservée. Dans l’angle avec la rue de la Chaîne, au sud de la placette se trouve un nouveau bâtiment (environ 1938, Eugène Rohmer), qui a bien faillit recevoir une « tourelle » quadrangulaire dans l’angle, dont l’esthétique a fait réagir les riverains, et a été refusée par la commission des façades. N’empêche, le nouveau bâtiment dans l’angle forme un signal, même s’il est moins ambitieux que celui prévu par Tim Helmlinger sur cette parcelle.
Parmi les bâtiments mis en valeur par les démolitions de la seconde guerre mondiale, il faut signaler le cas particulier du pignon gothique situé 7 rue de l’Épine. C’est un cas à part car cette maison a été découverte, au milieu des décombres, par l’architecte-conseil Charles-Gustave Stoskopf et Jean Clément, directeur départemental de la construction. Dans son esquisse, Stoskopf créé une échancrure dans le nouvel immeuble, 5-7 et 9-11 rue de la Division Leclerc (1957, Charles Gustave Wolff, Claude Misbach). Cette échancrure, créant une placette, met explicitement en valeur ce pignon dont on lui doit la paternité de la mise en scène56, avec en toile de fond également la cathédrale. Le projet de Dopff prévu à cet emplacement dans les années 1930 prévoyait un bâtiment longitudinal qui ne sera jamais réalisé faute de financement. Il faut préciser que le contexte n’était pas le même puisque devant le pignon gothique se trouvaient d’autres bâtiments démolis lors des bombardements de la seconde guerre.
Enfin, il faut signaler en particulier les deux îlots qui ont été préservés par la 2e tranche jusqu’aux années 1960, les 9-15 rue des Francs Bourgeois comportant 6 maisons et les 15, 17 rue de la Division Leclerc et 1-3 rue de la Douane, comportant des maisons du XVe et XVIe siècle. Les maisons 9-15 rue des Francs Bourgeois seront démolies en 1968, modifiant la perception que l’on a aujourd’hui sur cette 2e tranche de la Grande Percée.
place de la Chaîne d'Or avec maisons préservés au 11 rue de la Chaîne
vue sur rue du Paon entre les n°5-7 et n°9-11 rue de la Division Leclerc, pignon gothique et flèche de la Cathédrale en arrière plan
Maison du XVIe mise en valeur entre deux nouveaux immeubles rue des Francs Bourgeois
vue d'angle. On aperçoit à gauche la tourelle du 6 rue du Vieux Seigle et au fond la flèche de la Cathédrale
Conclusion
Par de nombreux aspects, cette deuxième tranche se trouve dans la continuité de la première tranche, historique d’abord et architecturale. Néanmoins la seconde tranche est plus difficile à apprécier pour le promeneur du fait que le bâti y est plus hétérogène, mais aussi plus sobre en terme de décor.
Le résultat de cette seconde tranche est probablement très différent de ce qu’avait imaginé Dopff en 1920, puisque les nouvelles réalisations sont hétérogènes, c’est ce que j’ai essayé de montrer à travers une classification, sans doute réductrice, en quatre séries de constructions. En réalité il faudrait en rajouter une cinquième puisque plusieurs bâtiments anciens ont été conservés, rajoutant au coté hétérogène de l’ensemble. Une percée sinueuse avec des bâtiments homogènes comme sur la maquette de 1916 aurait donné un résultat tout à fait différent. La comparaison du plan type de Dopff pour la 2e phase avec la rue de Rivoli est intéressante car la percée n’a pourtant rien de parisienne. Beblo avec sa maquette projetée (1916) et Dopff avec son plan-type (1920) ne tenaient pas tant à une monumentalité exogène, qu’à un paysage homogène s’inscrivant dans le contexte local, d’où le choix du grès rose comme l’Aubette cité en exemple ou la référence aux arcades de la rue des Grandes Arcades. Le résultat de la 2e tranche, s’étendant sur plus de 40 ans, est le résultat du changement de nationalité de la ville, son administration, ses architectes et les tendances architecturales à chaque époque. L’apport de Paul Dopff est indéniable, notamment sur la contextualisation de certaines façades, allant jusqu’au mimétisme. On peut aussi souligner l’apport de la commission des Beaux-Arts qui a permis d’améliorer le traitement des façades, gageant de la qualité de cette percée.
Malgré tout, un immeuble (9-15 rue des Francs Bourgeois, 1972), non prévu dans le projet initial, altère aussi la vision de cette tranche finalement assez courte (500 mètres). L’ensemble démoli, comprenant six maisons, était autrement plus pittoresque et renvoyait à la volonté de mise en scène du bâti, présente de différentes manières sur la totalité du parcours. Mais cet immeuble s’inscrit tout de même dans une forme de continuité puisqu’il possède la même échelle monumentale des nouveaux bâtiments et comporte des commerces en rez-de-chaussée, assurant la continuité urbaine, tout en mettant en valeur un bâtiment du XVIe.
Pour apprécier cette 2e tranche dans sa globalité, il faut déambuler de la place Kléber au quai Saint Thomas, on traverse ainsi près de 70 années de production architecturale, de 1914 à 197257, racontant ainsi un condensé de l’histoire architecturale strasbourgeoise au XXe, avec en second plan, jamais très loin, le vieux Strasbourg qui nous est rappelé, comme une figure tutélaire ou une citation des théories mémorielles de Camillo Sitte. Vue ainsi, cette hétérogénéité n’est plus une faiblesse mais une force. Si les places et rues homogènes sont souvent citées en exemple, telle la place des Vosges ou la rue de Rivoli à Paris ou la place Stanislas à Nancy, il ne faut pas oublier que la place du Château à Strasbourg mélange des bâtiments ayant plusieurs siècles d’écarts et pourtant fonctionne très bien.
Cette percée dans son tracé est bien davantage allemande que française, pour son tracé sinueux, son aspect pittoresque, la préservation du patrimoine et sa mise en scène. Cette spécificité dans une ville désormais française est remarquable. Les interférences entre Allemagne et France font partie de l’histoire de la ville depuis plusieurs siècles. Cela se traduit par des distinctions patrimoniales. Depuis 1974 la partie sud de la Grande Ile fait partie du secteur sauvegardé (incluant une partie de la 2e tranche). La Grande Ile où se trouve cette 2e tranche est classée Unesco depuis 1988. Enfin, depuis 2011, la quasi totalité de la Grande Percée fait partie du plan de sauvegarde et de mise en valeur (PSMV).
En utilisant le fond de carte de 1852 pour localiser le tracée de la Grande Percée (2e tranche), j’ai été surpris d’y retrouver le parcellaire de la quasi totalité des maisons. En fait si on regardes plus loin, avec le Plan Blondel de 1765, on se rend compte que le parcellaire du vieux Strasbourg, en particulier dans le secteur de la Grande Percée, a peu changé jusqu’au début XXe. Cette apparente stabilité ne doit pas masquer la modernisation des façades y compris leur surélévation.
On constate aussi des initiatives singulières sur le tracé, comme par exemple la présence de l’ancien cinéma Eldorado, construit de façon provisoire en plein milieu du parcours de la Grande Percée, en 1911. Les constructions temporaires liées aux démolitions de la seconde guerre mondiale, essentiellement à vocation commerciale, seront elles construites sur les futures parcelles à bâtir.
Au cours de ces recherches, même si ce n’était pas le premier objectif, j’ai éprouvé des difficultés à connaître les éléments qui ont été précisément sauvegardés des maisons démolies. Quand on regarde les dossiers d’inventaire des 132 maisons réalisées en 1907, on constate que de nombreux éléments auraient dûs être sauvegardés, mais il est difficile de savoir ce qui l’a réellement été. On trouve peu d’éléments visibles dans les musées, peut être sont-ils dans les réserves ? Ce seraient des recherches à approfondir, il reste à mon avis encore beaucoup à découvrir, y compris chez des particuliers comme réemploi. Les sources imprimées et d’archives étant nombreuses, il a fallut faire des choix sur les aspects à mettre en lumière. L’abondance photographique des maisons démolies sur la majeure partie de la nouvelle voie permet d’avoir une excellente représentation du vieux Strasbourg disparu. Ainsi c’est sous cet angle que j’ai souhaité axer mes recherches : qu’a-t-on démoli, pour construire quoi ? On trouvera la majeure partie des photographies anciennes sur le site des Archives de la Ville de Strasbourg, mais aussi plusieurs reproductions sur les sites Archi-Wiki et Maisons de Strasbourg. Le piéton, à l’aide des anciens plans mis à disposition et des anciennes photographies, peut ainsi s’imaginer ce « Strasbourg disparu ».
Il existe aussi des représentations en trois dimensions du vieux Strasbourg, qui correspond encore en bonne partie au vieux Strasbourg d’avant 1910, à travers les plans relief de 1725-27 et 1830. Malheureusement les campagnes photographiques de ces deux plans reliefs ne sont pour l’heure pas mises à disposition du grand public. Je n’ai pu exploiter qu’une infime partie des photographies des plans relief que l’on trouve dans certains sources (en particulier les recherches de Thierry Hatt et Jean-Michel Wendling). Des vues détaillées de la Grande Percée, issues des plans relief permettraient de se rendre compte de la façon dont se présentait ce lacis de ruelles. On pourrait même imaginer y insérer sous forme de textures les photographies anciennes et pouvoir y déambuler « comme si on y était ».
En attendant, tout le monde peut apprécier le résultat de la Grande Percée, particulièrement varié, tant en terme de styles architecturaux que de types de bâtiment. C’est un morceau de ville qui fonctionne très bien et permet désormais au tramway de circuler sur la totalité des 2e et 3e tranche. Les vues ménagées sur le vieux Strasbourg permettent d’avoir un condensé de la Ville, à la fois moderne et métropolitain, tout en assumant avec fierté ses rues anciennes et son patrimoine vernaculaire. Ses concepteurs n’ont pas cherché à nier le vieux Strasbourg, en lui tournant le dos, ni à l’annihiler, en le démolissant pour créer une nouvelle Neustadt, c’est bien une couture urbaine qui a été réalisée de façon très pragmatique. La 1ère et la 2ème tranche de la percée se distinguent par le fait qu’elles ont fait entrer Strasbourg dans la modernité, lui faisant quitter son aspect provincial avec un centre ville à l’hygiène et aux ruelles douteuses, pour une grande ville moderne, aérée et commerçante, à l’image d’une capitale.
La réussite de la Grande Percée tient à sa double inclusion dans le tissu ancien, à la fois dans ses raccords avec l’existant, et dans les vues qu’elle ménage à intervalles réguliers sur son patrimoine vernaculaire, sous la forme d’un dialogue. On peut bien sur regretter certaines démolitions : les multiples protections et déclassements soudains témoignent de ces hésitations et de ce déchirement à voir ainsi le vieux Strasbourg perdre parmi ses plus beaux fleurons, parfois pour des raisons économiques.
A travers les éléments conservés, les photographies et la mise en scène du patrimoine conservées in situ, les concepteurs de la Grande Percée ont réussi, sur une quarantaine d’années, à réaliser ce travail de mémoire, osons le dire, d’enracinement, permettant aux habitants de savoir d’où ils viennent, tout en modernisant la Ville à une échelle humaine et urbaine.
Fabien Romary
Fondateur d'Archi-Wiki
1ère publication sur Archi-Wiki le 21/01/2024
Références
- ↑ Attention Travaux, page 19
- ↑ AVES 153MW599
- ↑ Pour plus de détail voir Michäel Darin, Metacult (2018). Cette partie est largement documenté dans d’autres d’autres sources cités en bibliographie.
- ↑ Florence Petry, pages 53 et 55
- ↑ Michaël Darin, [Metacult, 2018], page 378, voir aussi Tobias Möllmer, [Metacult, 2018], page 502 et pour plus de détail, Sophie Eberhardt, La préservation de l’image de la ville à Strasbourg aux prémices du XXe siècle in Histoire Urbaine, 2016, pages 167-186
- ↑ Der Städtebau nach seinen künstlerischen Grundsätzen, Maladroitement traduit lors d’une première traduction par L’Art de bâtir des villes, le sous-titre de la dernière traduction est L’urbanisme selon ses fondements artistiques
- ↑ Florence Petry, pages 55-56
- ↑ Pour les Villes cités, Michael Darin, [Metacult], page 370, pour les dates de percée, articles Wikipédia
- ↑ Fritz Beblo, Un architecte à Strasbourg, 1903-1918, page 91
- ↑ Stefan Fisch, Ibid, p181 et Michaël Darin, p379
- ↑ Stefan Fisch « Der Straßburger Große Durchbruch », page 174 et courrier de Dopff « 2. Pläne » du 14/06/1920, Cote AVES 153MW598
- ↑ Stefan Fisch, Ibid, p174 et descriptif du plan type par Dopff, Cote Archives 153 MW 598
- ↑ Sophie Eberhardt, Entre France et Allemagne, de la ville ancienne à la Neustadt de Strasbourg : la construction du regard patrimonial, thèse soutenue en 2015, sous la direction de Alexandre Kostka et Bernard Gauthiez, page 193
- ↑ Sophie Eberhardt, Ibid, page 249
- ↑ AVES 152MW20 réunion du 6 octobre 1927. Commission des Beaux-Arts, protection de l'aspect local
- ↑ D’après l’enquête de terrain de 1907 (Fragenbogen) et le plan de 1910
- ↑ Décision du conseil municipal du 2 juillet 1913 (AVES 816W172)
- ↑ C’est le cas au niveau du cinéma Vox, ainsi qu’au niveau de l’Impasse du Paon
- ↑ Attention Travaux, Op Cité, page 23
- ↑ Archives de la Ville 4 BA 7, Rapport d’activité du conseil municipal et de l'administration de la Ville de Strasbourg, 1919-1935, page 529-530
- ↑ AVES 4 BA 7, Op Cit, page 544
- ↑ AVES 4 BA 7, Op Cit, page 549
- ↑ Pour plus de détail voir : https://maisons-de-strasbourg.fr.nf/histoire/sources/enquete-prealable-grande-percee/ [archive]
- ↑ Attention travaux, page 28
- ↑ AVES 4 BA 7, Op Cit, page 542
- ↑ AVES 785W11, concours pour le plan d’extension de Strasbourg, 1924
- ↑ AVES 153MW603
- ↑ Stefan Fisch, Der Straßburger "Große Durchbruch" (1907-1957), 1997, page 178
- ↑ AVES 519W297
- ↑ La maison a pu être remontée suite à l’extension du Muée de l’Oeuvre Notre Dame en 1939 sous l’impulsion de Hans Haug
- ↑ Jean-Michel Wendling sur https://maisons-de-strasbourg.fr.nf/vieille-ville/s/rue-sainte-barbe/13-rue-sainte-barbe/ [archive]
- ↑ https://archiv.ub.uni-heidelberg.de/volltextserver/19113/1/Gozillon-Fronsacq_Cinemas.pdf [archive] Cinémas à Strasbourg 1900–1970, Odile Gozillon-Fronsacq, page 170
- ↑ Hosseinabadi Shahram in « El dorado » À la Française ou à l’allemande? une étude comparée des cinémas de Strasbourg; Revista de Arquitectura, vol. 17, n°.1, 2015, pp. 32-43. Universidad Católica de Colombia, Bogotá, Colombia , https://www.redalyc.org/pdf/1251/125143817004.pdf [archive] consultée le 27/10/2023
- ↑ Archives de la Ville 4 BA 7, Op Cit, page 547
- ↑ Benoit Jordan in Attention Travaux, page 37
- ↑ Voir : https://paris-promeneurs.com/groupe-scolaire-rue-kuss/ [archive]. On peut penser aussi aux bâtiments en gradin, plus ancien, construit par Henri Sauvage à Paris
- ↑ Projet de Dopff, daté de 1925, donc avant les bombardements de 1944
- ↑ Un acteur de la scène professionnelle des Trente Glorieuses, de la Reconstruction aux grands ensembles : l'architecte alsacien Charles Stoskopf (1907-2004), thèse de Gauthier Bolle, Sous la direction de Anne-Marie Châtelet, 2014, page 86
- ↑ Dopff travaille au service d’architecture de la Ville sous l’autorité de Beblo, dès 1912
- ↑ Wolfgang Voigt in Interférences, Architecture Allemagne-France, 1800-2000, 2013, page 50
- ↑ Wolfgang Voigt, Préserver le caractère d'une Ville : Paul Dopff und Strassbug in Metacult, 2018, page 425-427
- ↑ Dix années d’activités : Les réalisations de l’OPHBM de Strasbourg, 1924-1934, page X
- ↑ Stefan Fisch « Der Straßburger Große Durchbruch », op cit., page 179
- ↑ Fragebogen, voir pour plus de détail: https://maisons-de-strasbourg.fr.nf/vieille-ville/a-b/rue-de-l-ail/20-rue-de-l-ail/ [archive]
- ↑ La Süddeutsche Diskonto Gesellschaft, voir Attention Travaux, page 25
- ↑ Stefan Fisch in Der Straßburger "Große Durchbruch", page 204
- ↑ Vente du droit de superficie, dans ce cas le terrain était loué par Ville pendant 65 ans sous la forme d’un bail emphytéotique
- ↑ Archives de la Ville 4 BA 7, Op Cit, page 547
- ↑ Conservé au Musée Historique, voir aussi en ligne sur le site des Musées de Strasbourg
- ↑ Michaël Darin, Op Cite, [Metacult, 2018], page 380
- ↑ On peut lire l’expression « esprit de sacrifice » en parlant des démolitions in L’activité dans le domaine de l’Hygiène, Ville de Strasbourg, vers 1935, page 74-75
- ↑ Révision-extension du Plan de sauvegarde et de mise en valeur, étude préalable, août 2011, CUS, Direction de l’Urbanisme, page 19
- ↑ Voir aussi Michaël Darin, [Metacult], 2018, Op Cit, page 380
- ↑ Sans doute parce-qu’il s’agit d’une commande du MRU le dossier n’est pas aux Archives de la Ville, ni aux Archives départementales. Nous n’avons pas consulté les dossiers d’archives nationales, AN 53.02 et 53.03 peut être la réponse est-elle dans ces dossiers.
- ↑ François Choay in L’allégorie du Patrimoine, 1999, page 160, l’auteur cite aussi Viollet-le-Duc au côté de Sitte pour la mise en scène des bâtiments
- ↑ Il dessinera également une perspective artistique particulièrement éloquente
- ↑ Sans compter les modernisations de façades plus récentes
Annexes
Méthodologie
Pour réaliser ces recherches je me suis basé sur de nombreuses archives, principalement en provenance des Archives Municipales de Strasbourg (AVES) que je détaille dans les sources ci-dessous. J’ai également consulté plusieurs ouvrages, articles et sites internet quand ils étaient fiables. Ces ressources sont mentionnées en bibliographie.
J’ai utilisé plusieurs fonds de cartes pour déterminer l’ensemble des maisons démolies. Notamment le plan cadastral, daté de 1913 (Cote BNU M Carte 949) et un plan du 5 avril 1930 annexé à la DUP, où les anciennes maisons après la rue du Vieux Seigle sont visibles.
Pour la portion entre la place Kléber et la rue du Vieux Seigle je n’ai pas trouvé de plan aussi précis, je me suis ainsi basé sur le plan projet par Beblo de la Grande Percée, daté de 1910. Pour obtenir la numérotation et avoir une vision plus précise, j’ai utilisé le fond de carte du plan cadastral de 18521 et ai pu constater que l’ensemble des maisons existaient toujours en 1910 (pour la portion concernée par la 2e tranche), ce qui confirme l’ancienneté du bâti démoli. Ainsi en dehors de modification mineure il n’y a pas eu de modification profonde du bâti sur le secteur de la 2e tranche entre 1852 et 1910.
Je suis aussi redevable aux recherches de l’historien Jean-Michel Wendling, et à son site Maisons de Strasbourg, qui m’a permis dans bien des cas de déterminer la date de construction et de démolition des édifices démolis, même si ce n’était pas le premier objectif de ces recherches.
J’ai aussi abondamment utilisé et sans doute de façon exhaustive toutes les photos disponibles sur le site des Archives de la Ville, issu de l’inventaire photographique réalisé en 1907 et ultérieurement par le Service d’architecture de la Ville (Cote AVES 1 Fi). Cela m’a permis dans bien des cas de dater approximativement les bâtiments démolis.
Les architectes
Pour une biographie des architectes cités, notamment ceux qui ont construit les nouveaux bâtiments de la Grande Percée, le plus simple est d’utiliser les sources existantes, par exemple :
- Metacult, Strasbourg, Lieu d’échanges culturels entre France et Allemagne, Architecture et Urbanisme de 1830 à 1940, collectif, Deuscher Kunstverlag, 2018, pages 531-555
- Nouveau dictionnaire de biographie alsacienne (NDBA)
- ou encore le site en ligne www.archi-wiki.org
Bibliographie & Sources consultées
Par ordre alphabétique :
Adolphe Seyboth, Das alte Strassburg, 1890, incluant 4 carte datées de 1852 avec numérotation de 1858 que nous avons utilisée.
Adolphe Seyboth, Strasbourg historique et pittoresque, 1894
Alphonse Arbogast, Un problème d’urbanisme : La Grande Percée, (1952), Mémoire de 3e année de l’Ecole Pratique d’Administration (consulté aux Archives d’Alsace, site de Strasbourg)
Camillo Sitte, L'art de bâtir les villes - l'urbanisme selon ses fondements artistiques, traduction de Daniel Wieczorec, éditions de l'équerre, 1980, point seuil, 1996, traduction d’après l’original Der Städtebau nach seinen künstlerischen Grundsätzen (1889)
Collectif, Attention Travaux, Grande Percée, Archives de la Ville de Strasbourg, 2010
Collectif, « Fritz Beblo, un architecte à Strasbourg (1903-1919) », 2022, page 82-93
Florence Petry, La Grande percée à Strasbourg : les constructions des frères Horn, mémoire de maîtrise en histoire de l’Art, 2000., sous la direction de Laurent Baridon, 2 Tomes
Jean-Michel Wendling, Site « Maisons de Strasbourg », comportant de nombreuses maisons du Vieux Strasbourg avec une étude détaillée pour chacune d’entre elles, https://maisons-de-strasbourg.fr.nf [archive]. Je lui suis grandement redevable pour la datation et la date de démolition des bâtiments sur le tracé.
Karin Schneider et Joël Vincent, La Grande Percée, Mémoire d’un samedi-dimanche, 1978 (consulté aux Archives d’Alsace site de Strasbourg, Cote 2205-W-443DEPOT)
Michaël Darin in « L’alignement et le percement à Strasbourg » in Metacult, Strasbourg, Lieu d’échanges culturels entre France et Allemagne, Architecture et Urbanisme de 1830 à 1940, collectif, Deuscher Kunstverlag, 2018, pages 359-385
Michaël Darin. « La Grande Percée ». Dans Coll. Strasbourg, de la Grande-Île à la Neustadt : un patrimoine urbain exceptionnel. Sous la direction de la Ville et Communauté urbaine de Strasbourg. Lyon, Éditions Lieux Dits, 2013. p. 104-112.
OPHBM de Strasbourg : Dix années d’activités : Les réalisations de l’OPHBM de Strasbourg, 1924-1934, Société Française d’éditions d’Art, Paris
Sophie Eberhardt, « Entre France et Allemagne, de la ville ancienne à la Neustadt de Strasbourg : la construction du regard patrimonial », thèse soutenue en 2015, sous la direction de Alexandre Kostka et Bernard Gauthiez Sophie Eberhardt, La préservation de l’image de la ville à Strasbourg aux prémices du XXe siècle in Histoire Urbaine, 2016, pages 167-186, en ligne : https://www.cairn.info/revue-histoire-urbaine-2016-1-page-167.htm [archive]
Stefan Fisch, « Der Straßburger "Große Durchbruch" (1907-1957). Kontinuität und Brüche in Architektur, Städtebau und Verwaltungspraxis zwischen deutscher und französischer Zeit » in Grenzstadt Straßburg : Stadtplanung, kommunale Wohnungspolitik und Öffentlichkeit 1870-1940, Christoph Cornelissen ; Stefan Fisch ; Annette Maas, 1997, pages 103-204
Thierry Hatt, Le plan relief de 1725 un trésor du patrimoine des Musées de Strasbourg, 2006 http://www.crdp-strasbourg.fr/main2/arts_culture/architecture_patrimoine/documents/plan_relief.pdf [archive]
Tobias Möllmer in « Die Entwicklung der Strassbuger Baupolizei 1871-1918 » in Metacult, Strasbourg, Lieu d’échanges culturels entre France et Allemagne, Architecture et Urbanisme de 1830 à 1940, collectif, Deuscher Kunstverlag, 2018, page 502
Ville de Strasbourg, L’activité de la ville de Strasbourg dans le domaine de l'hygiène, Société française d’éditions d’Art, vers 1935, pages 71-75
Wolfgang Voigt in « Préserver le caractère d’une ville: Paul Dopff und Strassburg » in Metacult, Strasbourg, Lieu d’échanges culturels entre France et Allemagne, Architecture et Urbanisme de 1830 à 1940, collectif, Deuscher Kunstverlag, 2018, pages 425-447
Wolfgang Voigt in Régionalisme et « Heitmatschutz » en Alsace, Interférences, Architecture Allemagne-France, 1800-2000, 2013, page 42-51
Archives de la Ville et de l’Eurométropole de Strasbourg (AVES)
Nouveaux immeubles :
:
Cotes 816W159 (5 rue des Francs Bourgeois), 816W145 (« Le Nouvel Hôtel » 4 rue des Francs Bourgeois), 816W169 (9-15 rue des Francs Bourgeois et 3 rue du Vieux Seigle), 816W172 (17 rue des Francs Bourgeois), 816W161 (« Strasbourg Building » 6 rue des Francs Bourgeois), 685W05 (1 rue de la Division Leclerc), 685W07, 152MW20 (2 rue de la Division Leclerc), 685W07 (4-6 rue de la Division Leclerc), 919W94 (8 rue de la Division Leclerc), 685W8 (3 rue de la Division Leclerc), 685 W 12 (10-12-14-16-18 rue de la Division Leclerc), 685 W 10, 685 W 11 (5-7 rue de la Division Leclerc et 9-11 rue de la Division Leclerc), 685 W 16 (20-22-24 rue de la Division Leclerc et 7 quai Saint Thomas)
Autres dossiers en lien avec la Grande Percée :
4 BA 7, Rapport d’activité du conseil municipal et de l'administration de la Ville de Strasbourg, 1919-1935, pages 504-554
96 W 9 - Grande Percée 1910 - Rapport Schwander
96 MW 214 2e tranche de la grande Percée, place Kléber Grand rue Elevation de Fritz Beblo pour la 2e tranche de la Grande Percée
113 MW 999 Fiche de visite de certains immeubles destinés à être démolis Enquête sur 132 maisons sur le tracé de la Grande percée, 1907
152 MW 20 Commission des Beaux-Arts, protection de l'aspect local. - 1923/1937
152 MW 9 Plan d'aménagement et d'extension, concours. - 1923/1932
153 MW 591 Correspondance, notes, rapports, coupures de presse, imprimés, procès-verbaux, plans – 1853-1930
153 MW 593 1ère et 2è parties : notes, correspondance, rapports, facture, procès-verbal, plans, coupure de presse, devis. - 1913/1919
153 MW 598 2è et 3è parties : notes, rapports, correspondance, procès-verbaux, coupure de presse, plans. - 1915/1931
153 MW 599 Propriétés municipales à l'angle des rues de la Demi-Lune et des Chandelles, construction : plans de situation, rapports, devis, notes, contrat. - 1905/1908
153 MW 602 Tronçon de la Grand'Rue à la place de la Bourse, démolition de bâtiments 1930-1941
153 MW 603 DUP 1932-1938
154 MW 20 Grande percée de Strasbourg, classement et déclassement d'immeubles : - 1933/1938
154 MW 9 Inscription à l'inventaire des monuments historiques - 1927-1938
519 W 297 Musée de l'Oeuvre Notre Dame (Hans Haug)
Archives d’Alsace (site de Strasbourg)
AA 2205-W-DEPOT443 Fond ENSAS « Grande Percée », 1978
AA 4°2713 Un problème d'Urbanisme La Grande Percée à Strasbourg, Arbogast Alphonse, 1952
Annexes : tableaux
Réalisations de la 2e tranche
n° | Adresse | Date de construction | Maître d’ouvrage | architectes |
1 | 5 rue des Francs Bourgeois (Strasbourg) | 1925 | Auguste Muller et le Dr. Alfred Kuhn | Paul Riegert et Adolphe Wolff |
2 | « Le Nouvel Hôtel » 4 rue des Francs Bourgeois | 1926 à 1927 | Société immobilière et Hôtelière de France, Paris-Strasbourg | Gustave Oberthur |
3 | 9-15 rue des Francs Bourgeois et 3 rue du Vieux Seigle | 1969 à 1972 | Compagnie d’Assurances Trieste & Venise | Albert Sensfelder |
4 | 17 rue des Francs Bourgeois | 1939 à 1947 | Société Immobilière des Francs Bourgeois | Vladimir Scob et Adolphe Wolff |
5 | « Strasbourg Building » 6 rue des Francs Bourgeois | 1928 à 1930 | SCI Strasbourg Building | Adolphe Wolff et Paul Riegert |
6 | 21 rue des Francs Bourgeois | 1934 | Société Immobilière de la Grande Percée S.A. | Edmond Picard |
7 | 1 rue de la Division Leclerc | 1936 à 1938 | Mrs E. et P. Frey en association avec les entrepreneurs Th. et Ed. Wagner à Strasbourg | Adolphe Wolff et Paul Riegert |
8 | 2 rue de la Division Leclerc | Environ 1938 | SCI en formation rep par. M. Jean Muller | Eugène Rohmer |
9 | 4-6 rue de la Division Leclerc | 1954 à 1956 | Société en copropriété " Division Leclerc " | Eugène Rohmer |
10 | 8 rue de la Division Leclerc | 1954 à 1956 | Société civile immobilière des Nouvelles Arcades | Albert Sensfelder |
11 | 3 rue de la Division Leclerc | 1933 à 1935 | René Hauss, imprimeur, rue de l'Ail | Henri Risch et Frédéric Herveh |
12 | 10-12-14-16-18 rue de la Division Leclerc | 1933 à 1935 | Office Public d'Habitations à Bon Marché (OPHBM) | Paul Dopff |
13 | 5-7 rue de la Division Leclerc | 1954 à 1957 | Société Coopérative de Reconstruction | Charles Gustave Wolff et Claude Misbach |
14 | 9-11 rue de la Division Leclerc | 1954 à 1957 | Société Coopérative de Reconstruction | Charles Gustave Wolff et Claude Misbach |
15 | 20-22-24 rue de la Division Leclerc et 7 quai Saint Thomas | 1933 à 1935 | Office Public d'Habitations à Bon Marché (OPHBM) | Paul Dopff |
16 | Pont Saint-Nicolas | 1935 | Ville de Strasbourg | a priori service municipal d'architecture |
Réalisations de la 3e tranche (à titre informatif)
n° | Adresse | Date de construction | Maître d’ouvrage | architectes |
1 | Église Saint-Nicolas | 1905 (façade est) | ? | Emile Salomon |
2 | 1-3 Rue de la Première Armée, 8 rue d' Or, 12 quai Saint Nicolas | 1964 à 1969 | S.C.I. « Le Quercy » | Marie-Olivier Lapparent (De) |
3 | 4 rue de la Première Armée | 1938 à 1950 | Société Civile Immobilière « Quai Saint-Nicolas » | Arthur Wagenbach |
4 | 11 et 3 rue d'Or | 1962 à 1963 | SA Zimmer | Antoine Pfirsch |
5 | 13-15 Rue de la Première Armée | 1959 à 1961 | SA Zimmer | Marie-Olivier Lapparent (De) |
6 | 6-8 Rue de la Première Armée et 15 rue d'Or | 1961 à 1963 | Société Civile Immobilière « rue de la 1ère Armée » rep. Albert Sensfelder | Albert Sensfelder |
7 | 10-12 rue de la Première Armée | 1958 à 1960 | Société Civile Immobilière « Sud » Rep. Admin A. Strohmenger | Albert Strohmenger et Marcel Strohmenger |
8 | 17-19-21-23-25 Rue de la Première Armée et 16 rue Sengenwald | 1957 à 1958 | Société Civile Immobilière « Centre »Rep. Admin A. Strohmenger | Albert Strohmenger et Marcel Strohmenger |
9 | 14-16 Rue de la Première Armée et 29 rue des Bouchers | 1960 à 1962 | Société Immobilière du Rhin | Mario Cardosi |
10 | 2-4-6-8 rue Paul Reiss et 20 rue de la Première Armée | 1972 à 1975 | SCI rue Paul Reiss rep. Mme Philippon | Alfred Kronenberger, Marcel Strohmenger et Gérard Ittel |
Maisons inscrites ou classées démolies et éléments conservés
Adresse | Date de construction | Date d'inscription | Déclassement | Démolition | Fichier Inventaire 1907 | Devenir, éléments conservés |
2 rue des Sept-Hommes | Vers 1760 | 1912 | X (75) | 26 août 1919 : le Musée des Arts Décoratifs a reçu : - un porte d’entrée avec son encadrement en pierre | ||
4 rue des Sept-Hommes | XVIIIe | 1912 | X (76) | |||
6 rue des Sept-Hommes | 1748 | 1913 | X (77) | |||
8 rue des Sept-Hommes | 1748 | 1913 | X (78) | |||
10 rue des Sept-Hommes | XVIIe ? | vers 1913 | ||||
12 rue des Sept-Hommes | XVIIIe | 1919 | ||||
14 rue des Sept-Hommes | XVIIIe | vers 1919 | ||||
16 rue des Sept-Hommes | XVIIe ? | vers 1919 | ||||
2 rue des Chandelles | vers 1780 | 1920 | ||||
4 rue des Chandelles | XVIIe ? | 1920 ? | ||||
6 rue des Chandelles | XVIIIe | 1919 | X (82) | |||
8 rue des Chandelles | XVIIe ? | 1920 ? | X (83) | |||
10 rue des Chandelles | XVIIe ? | 1920 ? | ||||
12 rue des Chandelles | mi-XVIe | 1907 | ||||
14 rue des Chandelles | 1575 | vers 1907 | ||||
16 rue des Chandelles | vers 1551 | 1907 | ||||
18 rue des Chandelles | vers 1760 | 1907 | ||||
20 rue des Chandelles | ? | 1907 | ||||
22 rue des Chandelles | 1676 | 1907 | ||||
24 rue des Chandelles | ? | 1907 | ||||
26 rue des Chandelles | XVIe | 1907 | ||||
3 rue de la Demi-Lune | XVIIe ? | 1907 | X (81) | |||
5 rue de la Demi-Lune | XVIe ? | 1907 | ||||
1 rue Sainte-Barbe | XVIIIe ? | 1912 | ||||
3 rue Sainte-Barbe | XVIIIe ? | 1912 | ||||
5 rue Sainte-Barbe | XVIIIe ? | 1912 | ||||
1 ruelle de la Cuiller-à-Pot | ? | 1907 | ||||
3 ruelle de la Cuiller-à-Pot | ? | 1907 | ||||
5 ruelle de la Cuiller-à-Pot | ? | 1907 | ||||
9 rue des Chandelles | XVIIIe ? | 1965 | ||||
11 rue des Chandelles | XVIIIe ? | 1965 | ||||
13 rue des Chandelles | XVIIIe ? | 1965 | ||||
15 rue des Chandelles | XVIIIe ? | 1965 | ||||
1 rue du Vieux-Seigle | XVIIIe ? | 1965 | ||||
3 rue du Vieux-Seigle | XVIIe ? | 1965 | ||||
5 rue du Vieux-Seigle | 1557 | 22/03/1965 | 1965 | Démolition d’une aile renaissance dans la cour. Ces éléments ont été inscrits pour les protéger. Fontaine et montants de fenêtres remontés chez l’architecte Albert Sensfelder, 44 rue du Général Offenstein (Meinau) La porte d'entrée sur cour datée de 1557 a trouvé un emplacement provisoire dans les ateliers de l’œuvre Notre Dame 94 rue de la Plaine des Bouchers. | ||
2 rue du Vieux Seigle | XVIIe ? | vers 1910 | ||||
4 rue du Vieux Seigle | XVIIIe ? | vers 1910 | ||||
4 rue de la Demi-Lune | XVIIIe | vers 1915 | ||||
6 rue de la Demi-Lune | XVIIIe | vers 1915 | ||||
2 rue des Fribourgeois / 8 rue de la Demi-Lune | Fin XVIe | 1915 | X (84) | |||
4 rue des Fribourgeois | XVIIe ? | vers 1915 | X (85) | |||
6 rue des Fribourgeois | XVIIe ? | vers 1915 | X (86) | |||
121 Grand Rue | XVIIe ? | vers 1920 | ||||
123 Grand Rue | XVIIIe | vers 1920 | X (88) | 22/12/1919 : Les poutres profilées du rez-de-chaussée ont été livré au musée des arts décoratifs. | ||
125 Grand Rue | XVIIIe | 1914/1915 | démoli pour la création de la rue des Francs Bourgeois | |||
127 Grand Rue | 1776 | vers 1933 | démoli pour construire le 21 rue des Francs Bourgeois | |||
129 Grand Rue | XIXe | 1934 | X (90) | démoli pour construire le 21 rue des Francs Bourgeois | ||
136 Grand Rue | Environ 1730 | 1934 | X (91) | La façade du premier étage a été remontée au 143 route de Lyon à Illkirch | ||
138 Grand Rue (ancien Poêle de la Tribu des Maréchaux) | XVIIe et XVIIIe | MH 16/02/1930 | Vers 1936 | vers 1936 | Galeries datées de 1657 remontées au Musée de l'Œuvre Notre-Dame (Cour des Maréchaux) | |
4 rue de la Chaîne | ? | vers 1933 | ||||
6 rue de la Chaîne | ? | vers 1933 | ||||
19 rue des Serruriers | 1783 | vers 1933 | ||||
21 rue des Serruriers | 1783 | 1934 | X (92) | |||
23 rue des Serruriers | XVIIIe | vers 1933 | Une cheminée est réservée pour les Musées, mais une autre cheminée provenant du même immeuble est proposée à un particulier au prix de 200 francs. | |||
25 rue des Serruriers (Maison Brackenhoffer) | environ 1787 | Ismh 23/12/1932 | 22/05/1933 | vers 1933 | Le Musée des Arts Décoratifs a reçu : la grande grille sur rue, la grande grille du balcon, boiserie d’alcôve, une cheminée et son trumeau et d'autres boiseries | |
12 rue des Serruriers | XVIIIe | Vers 1936 | ||||
14 rue des Serruriers | XVe | Vers 1936 | ||||
16 rue des Serruriers | 1775 | 1936 | X (94) | |||
6 rue du Puits | XVIIIe | Vers 1933 | ||||
8 rue du Puits | ? | Vers 1933 | ||||
1 rue de la Lie | ? | Vers 1933 | X (95) | |||
2 rue de la Lie / 13 rue de l’Ail | XVIe | Vers 1933 | X (99) | |||
3 rue de la Lie / 9 rue de la l’Ail | XIXe et XVIe | 1933 | X (9) | |||
4 rue de la Lie | XVIIe ? | vers 1933 | X (100) | |||
5 rue de la Lie | ? | vers 1933 | X (97) | |||
6 rue de la Lie | XVIe | 1934 | X (101) | |||
7 rue de la Lie | ? | vers 1933 | ||||
8 rue de la Lie | XVIe ? | 1935 | X (100) | |||
9 rue de la Lie | XVIIe ? | 1933 | X (98) | |||
10 rue de la Lie | XVIe ? | vers 1935 | X (100) | |||
12 rue de la Lie / 16 rue des Serruriers | 1775 | 1936 | X (94) | |||
9 rue de l'Ail / 3 rue de la Lie | XIVe et XVIe | 1933 | X (9) | |||
11 rue de l'Ail | XVe | 1933 | X (102) | |||
13 rue de l'Ail / 2 rue de la Lie | XVIe | vers 1933 | X (99) | |||
15 rue de l'Ail | ? | vers 1933 | ||||
18 rue de l'Ail | XIVe | 1932 | Belle maison gothique du XIVe avec pignon à redents Boiseries gothiques remployées dans le « Hirschhof » agrandissement du Musée de l'Oeuvre Notre-Dame | |||
20 rue de l'Ail, 7 rue du Bateau | vers 1698 | Ismh 25/06/1929 | 07/07/1932 | 1932 | Le bel escalier de bois dans la cour, les deux baies en plein cintre datées de 1698 et la porte Louis XVI sont normalement conservés au Musée Historique. Une maquette avec colonne corinthienne (datée de 1840) et une fontaine du XIXe ont normalement été conservées (source : Relevé de 1907 Fragebogen / Maisons de Strasbourg) | |
1 rue du Bateau | ? | vers 1932 | ||||
3 rue du Bateau | XIVe ? | vers 1932 | X (105) | |||
5 rue du Bateau | ? | vers 1932 | ||||
7 quai Saint Thomas (ancien Hôtel de l’Esprit) | vers 1760 | 1932 | X (106) | Bel intérieur fin XVIIIe au premier étage. Salle de l’Esprit. Pas vu d’éléments sauvegardés dans les sources | ||
8 et 9 quai Saint-Thomas | XVIIIe | vers 1932 | X (107) et X (108) | démoli pour la création de la rue de la Division Leclerc |
- ↑ Extrait de l’ouvrage de Seyboth, Das Alte Strassburg, Avec la numérotation de 1858